Madame de MIREMONT de 1789 à 1811

 

Emigration, divorce et vie à Soissons.
 
 
            Dans notre brochure sur le comte et la comtesse de MIREMONT, publiée en novembre 1990, nous avons présenté un bref résumé de nos recherches sur l’émigration et la fin de la vie de Madame de MIREMONT (Chapitres X et XI).
 
            Nous allons ici reprendre en détail cette histoire, en y intégrant les éléments déjà publiés par Monsieur de PUISIEUX en 1892 et par Monsieur de BUTTET en 1989, ainsi que les résultats de nos dernières recherches à ce sujet.
 
            La communication de Monsieur de PUISIEUX a été publiée dans les mémoires de la Société des antiquaires de Picardie, tome XVIII, page 62 à79. Il ne consacre que deux pages et demie à cette période de la vie de Madame de MIREMONT. La communication de Monsieur de BUTTET a été publiée dans les mémoires de la Fédération des sociétés d’histoire et d’archéologie de l’Aisne, tome XXXIV, pages 78 à 94. Il consacre cinq pages à la même période.
 
            Pour écrire son mémoire, Monsieur de PUISIEUX a eu accès à des « Mémoires manuscrits dédiés à Madame de SABRAN » [p.78]. Or, l’inventaire des biens de Madame de MIREMONT du 6 mai 1811 signale [p.38] «deux volumes couverts en papier verd (sic), de format petit in quarto, intitulés  Vie de l’Isle  ou mémoires philosophiques de la Comtesse de MIREMONT dédiés à son amie Madame la Comtesse de SABRAN à Rolsen[1], principauté de Waldeck 1798 ».  Destinés à l’impression, ces deux volumes ont été remis à Maître VERNIER, exécuteur testamentaire qui s’en est chargé afin de solliciter du gouvernement la permission de le faire imprimer, suivant les intentions de Madame de MIREMONT, consignées dans son testament. Cette autorisation n’a sans doute pas été accordée, et c’est probablement le texte consulté par Monsieur de PUISIEUX. Celui-ci ne donne en effet pratiquement aucun détail postérieur à 1798, date de ce manuscrit.
 
            Quant à Monsieur de BUTTET, il a étudié les dossiers d’archives (tant à Laon qu’à Paris) concernant l’émigration de Madame de MIREMONT. Il nous a aussi communiqué des renseignements sur Junot d’ATILLY, trouvés au service historique des armées (Nous en parlerons).
 
            Nous allons établir une chronologie très complète de cette fin de vie, en développant le contexte des relations et des amitiés, de lettres et d’affaires de Madame de MIREMONT. Nous reprendrons dans un prochain cahier la vie de Monsieur et Madame de MIREMONT en tant que seigneurs de Mauregny.
 
            A partir de 1789, la vie de Madame de MIREMONT se déroulera loin de Mauregny et du château de Coucy-lès-Eppes, où elle a habité avec son mari. Dès 1774, elle avait pris l’habitude de consulter le docteur TISSOT, un médecin célèbre de Lausanne (Suisse). Né en 1728 à Grancy, dans le pays de Vaud, celui-ci a fait des études à Montpellier. Il occupe la chaire de médecine de l’université de Lausanne en 1766, puis celle de Pavie en 1781, revient à Lausanne en 1784. Il publie en 1769 un recueil de ses ouvrages en 10 volumes, in 12, et notamment « De la santé des gens de lettres » (1769), puis un « Essai sur les maladies des gens du monde » (1770). C’est le docteur TISSOT qui a prescrit une cure thermale à Pise pour Madame de MIREMONT. Il s’agit en fait de la station thermale de Saint Julien (San Giulana Terme) au nord-est de Pise. Dans une lettre, Madame de MIREMONT parle des « bains de Saint Julien de Pise »). Madame de MIREMONT a donc reçu un passeport qui lui a été « accordé à Versailles le 21 avril 1789 par l’ancien gouvernement pour aller par le Tyrol aux eaux de Pise en Italie, ledit passeport valable pour deux mois seulement ».
 
            Elle devait aimer les voyages, aller à Pise en passant par le Tyrol, c’est un joli détour! Elle est revenue en France après ce séjour. Le 16 septembre 1789, la municipalité de Laon, délivre un passeport à « Monsieur le Comte de MIREMONT, partant de Coucy les Eppes, juridiction de Laon, lequel a déclaré aller à Lausanne en Suisse avec Madame la Comtesse son épouse, Monsieur de SERIONNE et Monsieur le chevalier de POMPERY, suivis de deux laquais et de deux femmes de chambre pour consulter le Docteur TISSOT sur leur santé » . Le 17 septembre 1789, un passeport est délivré« aux Sieurs L’HOTTE et L’ALLEMAND au service de Monsieur le Comte de MIREMONT, qui ont déclaré aller à Lausanne en Suisse avec Monsieur le Comte et Madame la Comtesse de MIREMONT ». « L’ALLEMAND » est le Sieur François BOËR, qui resta au service jusqu’à la mort de la Comtesse (Voir le testament de Madame de MIREMONT page 145 ).
 
            Ce voyage a été préparé soigneusement : Monsieur « Jean Jacques Accarias de SERIONNE, avocat au Parlement, censeur royal, demeurant à Paris » a fait enregistrer par le contrôle des actes de notaires de Liesse le 9 septembre 1789 une procuration pour « Monsieur René Luc SECARD, huissier, commissaire-priseur au Châtelet ».
            Né à Paris, Monsieur de SERIONNE, était censeur royal pour les belles lettres. Est-ce à ce titre, qu’il a fait connaissance de Madame de MIREMONT ? Il est l’auteur de plusieurs traductions publiées à l’étranger, et une publiée à Paris en 1787, traduite du comte ALFIERI (personnage dont nous parlerons plus loin). Quant à Christophe de POMPERY, c’est un ami des époux de MIREMONT, depuis au moins 1774. Il est seigneur en partie de Ciry-Salsogne, (10 km à l’est de Soissons).
 
            Le 1er octobre 1789, François Junot d’ATILLY, lieutenant colonel au régiment royal comté, obtient sa mise en congé de semestre, suivi d’un congé avec appointements pour prendre les eaux. C’est lui aussi un vieil ami des époux de MIREMONT. Monsieur de MIREMONT lui a en effet donné, le 17 juin 1783 pour « raison d’amitié, et en considération de l’ancienneté de leur liaison » la Terre et Seigneurie de Coucy-lès-Eppes, se réservant seulement l’usufruit.
 
            Tout ce petit monde est à Pise le 21 juin 1790. Monsieur Georg Von NOSTITZ, de Vienne en Autriche, qui gère les archives privées de l’Ordre de la Croix Etoilée, nous a communiqué le dossier contenant la demande faite par Madame de MIREMONT. Cette demande a été rédigée en Italien par un notaire de Pise. En voici la traduction et le fac-similé.
 
 « N° 564 - Maestà Reale Apostolica.
 
            Marie Madeleine d´AUBOURG, marquise de la Bove, épouse de Thomas Exupert François, comte de MIREMONT, baron de Montaigu, province de Lille, en France, très humble servante de Votre Majesté Royale apostolique, a l’honneur de joindre humblement à la présente respectueuse supplique, l’acte authentique de sa propre généalogie et de celle de la famille de son époux susdit qu´elle a fait dresser sur les authentiques papiers de famille par le notaire Florentin public de Toscane, qui habite aux bains de St Julien de Pise, d´où la demanderesse doit les restituer rapidement à leur susdite baronnie en France, et sur la justification desdits actes et plus encore sur la notoriété dans laquelle c´est mis en évidence, en continuation de la sollicitation qu´elle a eu l’honneur de présenter de vive voix directement à la personne de Votre Majesté Royale apostolique, alors que la suppliante a eu l’honneur d’être admise à Pise à l’appartement royal, à genoux devant une toute auguste souveraine.
 
            Humblement la supplie de vouloir la promouvoir au grade de Dame de la Croix, la décorant ainsi d´une distinction tant illustre, et de la demanderesse extrêmement désirée, aussi comme preuve du souvenir que votre Majesté Royale apostolique daigne d’avoir pour la suprême vénération qu´exprime la suppliante.
 
            Que de la Grâce
 
            Marie Madeleine d´AUBOURG, marquise de la Bove, comtesse de MIREMONT, supplie comme ci-dessus, de sa propre main ».
 
            A cette demande est annexée une pièce justificative ; c’est une généalogie de la famille de MIREMONT, rédigée, elle aussi en italien, appuyée sur des documents qui sont cités et sur le témoignage de trois témoins : Christophe de POMPERY, François Junot d’ATILLY, Jean Jacques Accarias de SERIONNE. Le document précise aussi que Monsieur de MIREMONT est présent, et que le notaire connaît bien les témoins pour les avoir fréquentés aux bains. Le document précise enfin que le comte de MIREMONT a présenté le passeport du ministre des affaires étrangères et celui de la municipalité de Laon.
 
 
Généalogie de la famille de Miremont
 
 
Descriptif de la généalogie de la famille de Miremont
 
Par l’éloignement de la Noble Dame Marie Madeleine d´AUBOURG, femme du Noble Thomas Exupert François des Comtes de MIREMONT de nationalité française, transférez-moi les notes transcrites aux dits Bains de Saint Julien de Pise, où la dite Comtesse de MIREMONT se traite depuis quelques mois en compagnie du susdit mari, et divers documents authentiques en idiome français et particulièrement les célèbres actes notariés des mains des juges royaux qui sont les suivants :
·       Quatre actes publics de procuration.
·       Un contrat public.
·       Un antique manuscrit légalisé.
·       Quatre alliances de baptême.
·       Et deux passeports dont le premier est du ministre des affaires Etrangères et le second de la municipalité de Laon.
            De ces documents retrouvés légalement, et après les avoir traduits, j´ai formé l’arbre généalogique.
            Tous ces documents je les ai montrés et fait examiner par des témoins choisis, lesquels ont convenu avec moi l’étude et la précision du susdit Arbre généalogique lequel transcrit des dits documents que je vais définir.
            Ces témoins ont été choisis à la formation du présent acte, le signeront en preuve de vérité. Ces témoins que je connais très bien et que j´ai fréquenté aux susdits Bains se dénomme ci-après :
·       Christophe de POMPERY, mousquetaire, chevalier aux ordres royaux militaire de Saint Louis.
·       François Junot d’ATILLY, lieutenant colonel du régiment du Roi, infanterie, cavalerie aux ordres royaux militaire de Saint Louis.
·       Jean Jacques de SERIONNE, homme de lettres.
            Tous trois d´origine Française.
            Commençons la description résultant des documents que le chevalier Antoine de MIREMONT, frère cadet du comte de MIREMONT d´Auvergne, Chamberlain du Duc de Bourgogne, fils du Roi JEAN fût le premier à s´installer en Champagne et que le 13 octobre 1369 épousa Jeanne d´ANGLURE.
            De ce mariage naquit Philippe de MIREMONT, qui le 21 juin 1405 épouse Isabeau d’ASPREMONT. - De ces témoins, il m´a été assuré que ces d´ASPREMONT sont à présent en France.
            De ce mariage naît Claude de MIREMONT, lequel le 19 novembre 1440 épouse Marguerite de TILLOY, qui hérita du marquis de CAMEVELLE, son oncle, la terre de Berrieux, qui donna le nom à cette branche des MIREMONT Berrieux, nom retenu actuellement de cette famille.
            Jehan de MIREMONT épousa Eléonore de BRUMIERES, naît d´une des plus antiques famille de France, qui avait en dote la terre de Gueux en Champagne, il m´a été assuré par les témoins, qu´ils donnaient le droit de présenter la « Page du SACRE » . Ce droit fût confirmé aux MIREMONT par Louis XIII par acte en l6lO pour le fils de la dernière femme des MIREMONT, en cas de manque de succession masculine.
            Qu´en successeur Antoine de MIREMONT, épousa le 03 juillet 1509 Isabelle des FOSSES de Coyalle.
            De qui naît Jehan de MIREMONT, qui épousa en 1541 Philippe de BOSSU des Comtes et Seigneurs de BOSSU de Flandres, ceci affirmé par mes témoins, ensuite devenu propriété de la maison de CHIMAY.
            De qui naît Guillaume de MIREMONT, qui épousa le 17 octobre 1564 Isabelle de Saint BLAISE, nièce du souverain d´Angoulême, fille naturelle de Charles d’Orléans, comte d´Angoulême, père de François ler. Que ledit Guillaume était chevalier aux ordres du Roi, colonel des légionnaires du Gouverneur de Laon, conducteur des .....? pour le Roi, gentilhomme ordonnance de sa Majesté et Maréchal héréditaire du Pays Laonnois. Charges dont les témoins m´ont assuré, qui revenaient à ce Maréchal de France et finalement, que Guillaume de MIREMONT devienne le Chef de la Famille, entendu que l’extension du nom d’AUVERGNE dont l’unique héritière Françoise de Saint EXUPERY épousa Henri de BOURBON mort en 1544, qui était neveu de Charles, fils naturel des connétables des BOURBON et de Louise d´ALBICH, Dame de DESTONVILLE, et Françoise de St-EXUPERY était la fille du même. De là naît cette De MIREMONT, et de Madeleine de SENETOIRE, qui veuve, pris les armes pour HENRI III. Laquelle en compagnie de ses fils tue MONTAL, lieutenant du Roi de cette Province.
            Qu´en successeur David de MIREMONT, lequel hérite des Comtes les postes et honneurs de Guillaume son père, et le 13 septembre 1593 épousa Marguerite d´ELBENE, nièce de Barthélémy d´ELBENE de Patie Florentine et de Clémence BUONACCORSI, fille de Marguerite de Julien d´ELBENE (du bien), gentilhomme ordonnance aux armes du Roi et de Catherine FORNABUONI de la même famille de LUCRECE FORNABUONI TRISAVOLA de la Reine Catherine de MEDICIS, laquelle était une Dame d’honneur, comme Marguerite d´ELBENE était Dame de Cour de la Reine Marie de MEDICIS, laquelle devient dans la famille des MIREMONT la Baronne de Montaigu. - Que des susdits et transcrits témoins vous assurent avec mon jugement de ne pas trahir pour la possession de cette Croix qui est encore possession de l’actuel Thomas Exupert François des Comtes de MIREMONT.
            Qu´en successeur François de Miremont, épousa le 03 mars 1637 Marthe de CHAMBLY, fille de André, seigneur de CHAMBLY, lequel François fût Maréchal héritier du territoire Laonnois.
            Que naît Alphonse de MIREMONT qui épousa le 16 décembre 1678 Marie Charlotte de GOUJON de THON, fille de Jérôme de THON, seigneur de CONDE et de Marguerite LOACON de SOMMIER une des plus célèbre maison de Champagne.
            Que naît Charles Alphonse de MIREMONT, seigneur de Berrieux, Montaigu et des neuf autres paroisses ; père de (Alphonse) Thomas Exupert François de MIREMONT, actuellement en résidence aux Bains Saint Julien de Pise ; épousa le 15 décembre 1710 Marie Françoise de FAY d´ATHIE, et que le Comte Thomas Exupert François de MIREMONT aussi seigneur de la terre de Berrieux parvenue à sa famille en 1430, mais de l’autre terre de Montaigu parvenue à sa famille en 1593.
            Le Notaire m´a assuré que le Comte Thomas Exupert François de MIREMONT et les siens, montreront le passeport actuel du ministre des affaires étrangères avec celui de la municipalité de Laon, tous deux en France.
            De ce mariage naît Alphonse César Emmanuel de MIREMONT Berrieux, chevalier de Malte, conjoint à Madeleine MOËT de LOUVERGNY - Il en résulte de ce document, qu´il existe neuf enfants deux fils et sept filles, qu´avec l’assurance des témoins, l´aîné sera promu capitaine des dragons au régiment du Languedoc sous le titre de Comte de MIREMONT et député de la noblesse du Vermandois aux états généraux actuels et que le second est Lieutenant au même régiment et chevalier de Malte jusque la fin de 1775.
            Finalement, il résulte des cartes produites que le Comte Thomas Exupert François de MIREMONT, Baron de Montaigu, en conséquence du service rendu de la Baronne à la Famille de Marguerite DELBENE jusqu´au 13 juillet 1556, contracta mariage avec Marie Madeleine d´AUBOURG, qui est fille de feu Augustin d’AUBOURG, Marquis de la Bove, seigneur d´Oeuilly, vicomte de Pargnan en Vermandois, chevalier aux ordres Royaux militaires de Saint Louis, colonel d´un régiment d´infanterie et commandant sur la « MOSA » - Ce marquis de la Bove père de la Comtesse Marie Madeleine
d’AUBOURG avait pour grand-père F.A. Denis d´AUBOURG, Marquis de Villambray, manquant un bras qu´il perdit au service et comme grand-mère Marguerite de Proisy, fille du Baron de Proisy qui eût en dote la terre de la Bove.
            De ce mariage est naît Augustin d´AUBOURG, Marquis de la Bove qui épouse Charlotte Françoise de BRONIGLY. Cet Augustin fût Gouverneur de la Cité de Compiègne, Capitaine Royal et Chevalier des deux ordres du Roi St-Michèle et du St-Esprit, connu sous le nom du Cordon Bleu.
            De Marie Madeleine d´AUBOURG, fille de feu Charlotte De FOUGERES de Courlandon, demoiselle éduquée à Saint-Cyr, que les témoins susdits ont affirmé, que d´essayer d´admettre n´importe qu´elle « douzelle » tuerait ces mêmes preuves, que d´admettre quiconque aux ordres de Malte, résulte que le père de Charlotte, César de FOUGERES de Courlandon était Chevalier aux ordres royaux militaires de Saint Louis et brigadier aux armes du Roi, lequel comme la Demoiselle de QUILLEBERGUE, fille du Gouverneur de Thionville.
            Tout est confirmé et ratifié au sujet de la tacite Croix par les témoins et transcrit bien comme de moi - Les raisons légales et vérités sont signées par notaire en acte transcrit.
            Acte fait aux Bains de Saint julien de Pise et saisi à mon office national.
Signé : Le Chevalier François Junot d´Atilly - Le Chevalier Christophe de POMPERY - Jean Jacques de SERIONNE
 
            Monsieur de PUISIEUX a décrit cette période : « Nous arrivons à 1789. L’inquiétude née des événements politiques s’unit aux conseils du médecin TISSOT pour faire prendre à Madame de MIREMONT le chemin de la Toscane.
 
La cour d’Autriche y vint séjourner peu après son arrivée. Présentée à l’empereur LEOPOLD, l’émigrée en reçut mille distinctions flatteuses et l’ordre de la Croix étoilée[2]. Elle avait eu l’agréable surprise de trouver ses ouvrages employés à l’éducation des archiduchesses ». Il s’agit de son « Traité de l’éducation des femmes » , (voir Monsieur de BUTTET et notre brochure « Le Comte et la Comtesse de MIREMONT »). Ancien grand duc de Toscane, LEOPOLD est devenu empereur sous le nom de LEOPOLD II, archiduc d’Autriche, roi de Bohème et de Hongrie. C’est à sa femme, l’impératrice Marie Louise que Madame de MIREMONT adresse sa demande. « La suppliante a eu l’honneur d’être admise à Pise à l’appartement royal, à genoux devant une tant auguste souveraine ».
 
 
            On peut penser, si Monsieur de MIREMONT est bien parti à Lausanne, que la décision de Madame de MIREMONT de rester à l’étranger a été prise dans cette ville et qu’elle n’était pas prévue. Ce qui expliquerait que son domestique ait dû lui prêter de l’argent. Ce fait a été mentionné à la demande expresse de son époux dans sa reconnaissance de dette à BOER du 18 frimaire an X (10 décembre 1801. De toute façon, s’il a fait le voyage à Lausanne fin septembre 1789, Monsieur de MIREMONT est probablement rentré en France : deux actes attestent sa présence à Coucy-lès-Eppes le 23 avril 1790 et le 26 avril 1790. On peut penser qu’il est donc revenu à Pise pour apporter le dossier nécessaire à la décoration de sa femme. Celle-ci précise d’ailleurs que « la demanderesse doit le restituer rapidement à leur susdite baronnie en France » .
 
Combien de temps est-il resté ?
 
 Le 7 février 1791 :
 
            « De Montaigu un Sieur X.... qui a été appelé au bureau du juge de paix de Sissonne à la requête du Sieur de Miremont se plaint de n’avoir pu se concilier : à cause de l’absence du Sieur Thomas Exupert de Miremont, citoyen de Coucy les Eppes, l’un des ci-devant seigneurs fugitifs et improbateurs des décrets de l’assemblée nationale ».
 
            Il est pourtant revenu avant le 25 décembre 1790 pour l’établissement d’un :   « Bail pour 9 ans de 3 pièces de terre appartenant à Monsieur De MIREMONT, au profit de Simon LONGUET, laboureur à Coucy, moyennant 1.000 livres » .
            Quant à Madame de MIREMONT, elle est partie en Toscane. Elle prend les eaux à Pise pendant « l’hiver 1789 » , sur prescription du docteur TISSOT et s’inscrit dans la colonie Alfiane, société littéraire, le 14 février 1790. Et le 21 juin, il est dit que « Comtesse de MIREMONT se traite depuis quelques mois en compagnie du susdit mari » aux bains de Pise.
 
            Pendant la période de 1790 à 1793, Madame de MIREMONT voyage beaucoup. Dans son testament, elle cite : Lucques, Pise, Florence. Monsieur de PUISIEUX cite : Rome, Naples, Venise, le pays de Bade. Il ajoute : « elle arriva à Bruxelles où une illustre amitié celle du maréchal de CLERFAYT, en qui elle rencontre l’union de la sensibilité et de la gloire, la consolera de la tristesse où la jettent les événements. Bientôt, le prince de LIGNE met à sa disposition le château de Beloeil (Belgique) avec la facilité d’y recevoir ses amis. Tel était le charme puissant qui captivait tous ceux qui approchaient Madame de MIREMONT alors âgée de 60 ans » .
 
            Charles Joseph, prince de LIGNE, est un maréchal autrichien, né à Bruxelles en 1735, décédé à Vienne en 1814. Il a refusé de diriger la révolte de Belgique en 1790. Ses voyages, sa vaste culture, sa fortune en firent l’incarnation du cosmopolitisme au XVIIIème siècle.
 
            La Belgique qui s’était révoltée contre les autrichiens en 1789 avait proclamé son indépendance en janvier 1790. Léopold devenu empereur, la fait réoccuper fin 1790, et il écrase la révolution liégeoise en janvier 1791. Le 27 août 1791, il publie avec GUILLAUME II de Prusse la déclaration de Pillnitz pour tenter de sauver la royauté française en appelant des souverains à agir. Le 20 avril 1792, la France déclare la guerre au  roi de Bohème et de Hongrie. Le 10 novembre 1792, la victoire française à Jemmapes libère la Belgique. Le 9 novembre 1792, les français sont arrivés à Ath, près du château de Beloeil [La Révolution dans l’Aisne - p.164]. Les Autrichiens reviendront en Belgique après leur victoire à Neerwinden le 18 mars 1793, et la quitteront le 26 juin 1794 après la victoire française à Fleurus.
 
            Le séjour de Madame de MIREMONT en Belgique a pu se produire pendant la première période d’occupation autrichienne en Belgique. Elle a présenté un certificat fait à Karlsruhe le 21 mars 1791. Cette ville est dans le pays de Bade, Madame de Miremont cite Karlsruhe dans son testament. De là à la Belgique la distance est courte. On sait aussi que Madame de MIREMONT se trouvait à Düsseldorf (au nord-est de la Belgique) en hiver 1792-1793, c’est-à-dire très exactement après l’occupation française en Belgique. Beaucoup d’émigrés ont suivi le même chemin. Mais Madame de MIREMONT a aussi fait des voyages en Toscane et à Pise en août 1791 pour y prendre les bains et peut-être en 1792.
 
            La 9ème liste supplétive des émigrés du département de l’Aisne de 1792 comprend « BOER François et BIRASTE Christine, surnommé Bibie ; domestiques de l’ex-comtesse de MIREMONT, dernier domicile connu : Coucy les Eppes ; lieu où ils disposaient des biens : Thionville - Moselle ; absents depuis 1792» .
 
            Les domestiques ont-ils rejoint Madame de MIREMONT lors de son séjour en Belgique (BAUER l’accompagnait en 1789).
 
            Début 1793, elle quitte la Rhénanie pour revenir en Toscane. Les dates d’une série d’attestations citées dans le dossier qu’elle déposera en 1793, évoquent l’idée d’un voyage continu : 26 et 27 janvier 1793 (Düsseldorf et Lausanne), 30 et 31 janvier 1793 (Bains de Pise et gens de lettre).
 
            Madame de MIREMONT tente alors d’éviter la saisie de ses biens et de se faire rayer de la liste des émigrés. Et c’est le dossier qu’elle a déposé à ce sujet en juillet 1793 qui fournit la plupart des renseignements consignés ci-dessus. Elle prétendait n’être partie à l’étranger que pour le besoin de sa santé et de « son application l’étude des sciences ».
 
            Son amie, Madame de SABRAN, a fait fin 1792 une démarche semblable : « Elle soutenait qu’elle n’avait pas émigré, qu’elle n’était que momentanément à l’étranger, et uniquement pour le bien de sa santé [Mangras - Delphine de SABRAN - p.135] .
 
            Il est par contre certain que Madame de MIREMONT avait beaucoup travaillé pendant son séjour à l’étranger, puisqu’elle avait rédigé trois volumes manuscrits (aujourd’hui introuvables) s’ajoutant aux sept volumes déjà parus de son « Traité d’éducation des femmes et cours complet d’instruction ».
 
            Le 13 juillet 1793, le procureur syndic du district de Laon donne droit à sa requête, reconnaissant que « son domicile fut toujours en Toscane » . Le département était d’un avis contraire « à cause du petit séjour de l’exposante à Düsseldorf » . Et le 21 juillet, il déclare « qu’il n’y a lieu à délibérer sur la pétition de la dite femme».
 
            C’est à cette époque qu’elle a pu retrouver la comtesse d’Albany dont elle dit dans son testament : « elle qui sait si bien aimer, et que je porte dans mon cœur. Je prie mon exécuteur testamentaire de lui faire part de ma mort : quai d’Arno, à Florence en Toscane ».
 
Louise, princesse de Stolberg, comtesse d’Albany, est née à Mons en Belgique en 1752. Allemande par sa naissance, française par sa culture, elle épouse en 1772 Charles Edouart STUART, prétendant à la couronne d’Angleterre, qui se révéla ivrogne et brutal. Elle l’abandonne en 1780 et se réfugie à Rome. Elle s’attache alors au comte Vittoria ALFIERI, poète tragique italien, et vit avec lui dès 1784. Elle l’épouse en 1788 à Paris où le couple vit de 1787 à août 1792, et retourne alors à Florence. Ils y finiront tous deux leur vie.
 
            Il est probable que Madame de MIREMONT est restée en Toscane au moins une partie de l’année 1793, car le grand duc de Toscane a rompu ses relations avec la France et les anglais s’étaient établis à Livourne. Ses efforts pour rentrer en France continuaient. Monsieur de BUTTET nous indique que le  8 septembre 1793, dirigé contre Mathieu DUMAS, était affiché à Paris un placarde intitulé « conseils aux émigrés » Il était fait mention d’une lettre qu’il reconnaissait avoir adressée au comité de salut public à propos de Madame de MIREMONT « voyageant comme cultivant les lettres et mal à propos inscrite sur la liste des émigrés et que l’administration de son département avait déjà provisoirement rayée de la liste...  » .
 
            Le comte Mathieu DUMAS est un général et historien, né en 1753 et mort en 1837. Il remplit plusieurs missions pour l’Assemblée Constituante, et sera député à l’assemblée législative en 1791. Après le 10 août 1793, il se borne aux travaux du comité militaire. Il émigra en Angleterre, rentra bientôt en France. Poursuivi et condamné à mort, il parvient à se réfugier en Suisse. Il n’est rentré définitivement qu’après le 18 brumaire. Il a laissé des écrits militaires et des mémoires.
 
            Nous ignorons où était Madame de MIREMONT quand elle rédigea le 21 mai 1794 son manuscrit « le rêve du moment » . Conservé à la bibliothèque municipale de Laon, ce document nous montre comment elle analyse les problèmes de son temps. Il a été rédigé au moment le plus radical de la révolution, au moment où elle commence à se développer vers l’étranger.
 
            Le 26 juin 1794, c’est la victoire française de Fleurus qui chasse de nouveau les autrichiens et les émigrés de Belgique. Le « rêve du moment » ce sont sans doute les idées de la Révolution, idées qu’elle critique.
 
EXTRAIT :
Le Rêve du Moment.
Vrai conte Moral
31 mai 1794
.           ...Si ces prétendus sages (les philosophes - NDLR) n´ont surpris notre admiration que par hypocrisie ; ils sont d´autant plus coupables qu´ils étoient plus éclairés ; et dès que la philosophie peut engendrer de tels monstres, tous les gouvernements doivent lui déclarer une guerre éternelle ; car l´ouvrage du dernier des cyniques sur le danger des sciences cesse d´être un paradoxe, jamais l´ignorance ne nous eut fait ce mal...
 
A la page 7, le texte couronne plusieurs pages critiques de tous les philosophes de ce temps.
 
            « ...En partant de l’examen des devoirs, elle fortifie le caractère ; en fixant la juste valeur des choses, elle garantit à la fois de la négligence des unes et de la sotte importance des autres. Mais ne croyait pas à la philosophie de tout homme qui veut porter un regard curieux sur le mystère des choses, qui viole audacieusement le sanctuaire, et qui croit renverser impunément pour l’ordre social, toutes les conventions qui du Pâtre au Souverain ne forment qu´un seul et même peuple. Le degré de l´échelle, en honneur, en rangs, en fortune, fixe encore moins les distances qu´ils ne marquent les liaisons et cette gradation doit exister dans les lumières comme dans toute espèce de choses...
 
            ...Il n´est pas vrai que l´homme social, puisse se passer de préjugés, la société ne serait plus qu´un composé bizarre, et tumultueux, car chacun ayant ses principes particuliers, voudroient qu´ils fissent règle. Les préjugés seuls couvrent toutes prétentions, par le despotisme avec lequel ils règnent sur les usages, et malheur aux nations qui cessent de les respecter, vous en éprouvez l´effet. Il n´est même pas sage de détruire toutes les superstitions, elles sont au peuple ce que le hochet est à l´enfance, et souvent c´est un des grands ressorts de la Politique : Brisez-le, elle ne pourra y substituer que de la fausseté, des mensonges et peut-être des supplices. Les superstitions nouvelles qui amusent, qui dirigent, sont préférables aux vérités qui tuent....
 
            ...Dès les premiers âges du monde, on a senti l’avantage de concentrer les volontés de tout dans le pouvoir d’un seul. L’intérêt commun fut l’origine des Empires. Alors le souverain, réunissant les plus augustes fonctions, étoit à la fois pontif et juge, ce qui le fit caractériser d’image de Dieu sur la terre...
 
            ...Les hommes ne seront jamais que ce qu´ils ont été, mus par les Passions, retenus par la Religion, contenus par les lois...
 
            ....Dès les premiers âges du monde, on a senti l´avantage de concentrer les volontés de tous dans le pouvoir d´un seul. L´intérêt commun fut l´origine des Empires, alors le Souverain, réunissant les plus augustes fonctions, étoit à la fois pontif et juge, ce qui le fit caractériser d´image de Dieu sur la terre...
 
            ...Esprits inquiets! hommes ingrats! n´avez-vous pas pour refuge, comme pour soutenir, une religion consolante...
 
            Ce manuscrit a peut-être été rédigé en Belgique, car Monsieur de Puisieux indique qu’après le séjour à Beloeil « commence pour elle une pérégrination souvent troublée à travers l’Allemagne » qui finira dans la principauté de Waldeck. La deuxième période d’occupation autrichienne de la Belgique se déroule de mars à juin 1794.
 
            En janvier et mars 1795, un inventaire en vue de saisir les biens de Madame de MIREMONT, émigrée, en vertu d’un arrêté du ci-devant district de Laon du 5 décembre 1794, en présence de la municipalité de Coucy-lès-Eppes. L’estimation du mobilier se monte à 21.708 F. Les immeubles consistent en la moitié d’un terrain de 4 à 6 verges planté en agrément provenant d’acquisition pendant leur mariage, et une somme de 60.000 F par son contrat de mariage à prendre sur FOUGERES, propriétaire de terre à Courlandon (Marne).
 
            Ce capital de 60.000 F est issu d’un partage d’héritage entre Alexandre de FOUGERES et Anne Charlotte de FOUGERES, épouse de Augustin d’AUBOURG, en 1740.
 
 
Le premier qui a gardé le domaine de Courlandon, reconnaît devoir cette somme à sa sœur, et à défaut de la rembourser, de lui verser une rente annuelle de 3.000 F. Ce capital a été donné en dot à Anne Marie Madeleine d’AUBOURG, lors de son mariage avec Monsieur de MIREMONT. Dès le 27 juillet 1792, celui-ci avait dû déposer au district de Reims « le contrat de 60.000 livres à prendre sur FOUGERES, propriétaire à Courlandon ». 
 
            Le 18 ventôse an V (8 mars 1797), un arrêté de l’administration centrale de l’Aisne précise que la pétition de Madame de MIREMONT sera envoyée au ministère de la police générale pour réparer envers la pétitionnaire les funestes effets de l’arrêté précédent. Cette demande sera refusée, bien qu’une attestation de plusieurs personnes de Coucy-lès-Eppes, du 21 juillet 1797 reconnaisse les qualités de Madame de MIREMONT à l’étude des sciences, et qu’elle avait commencé ses voyages en 1786 [COMBIER - La justice criminelle à Laon sous la Révolution - 1882 - T.II - p.492/493. En 1798, Madame de MIREMONT est dans la principauté de Waldeck à Arolsen, d’où est daté, nous l’avons vu un de ses manuscrits. C’est là, nous dit Monsieur de PUISIEUX, « qu’arrive en 1798 la douloureuse nouvelle de la mort du grand général autrichien qui lui fait écrire : si le portrait de TURENNE n’étoit pas fait, le même canevas serviroit pour celui de mon adoré maréchal de CLERFAYT » . François de CROIX, comte de CLERFAYT, est un maréchal autrichien, né à Bruille, Hainaut, en 1733, mort à Vienne en 1798. En 1792, il fut mis à la tête d’un corps de 12.000 autrichiens pour attaquer la France. Il participa aux batailles de Valmy, de Jemmapes et de Neerwinden, mais en 1794, il fut vaincu par JOURDAN à Aldenhoven, et en 1795, il avait réussi à faire lever le siège de Mayence. On notera ici, une fois de plus, où vont les amitiés de Madame de MIREMONT. Celle-ci gardera un souvenir ému de son séjour. Dans son testament, elle dit que « c’est au prince et à la princesse de Waldeck que tous les Français doivent élever des autels et offrir, autant d’actes d’amour, que de reconnaissance » . La société d’histoire de Waldeck (Waldeckischer Geschichts verein - Arolsen) nous a indiqué dans une correspondance du 17 mai 1995, qu’il « est bien connu que environ 1.800 émigrés français ont été accueillis à Arolsen ».
 
            Monsieur de PUISIEUX, nous dit que « le dénuement où tombèrent la plupart des émigrés finit par atteindre Madame de MIREMONT qui vécut alors d’une pension servie par la grande duchesse de Russie jusqu’à ce qu’elle eut obtenu sa radiation de la liste des émigrés » .
 
            Madame de MIREMONT a fait une nouvelle tentative pour obtenir sa radiation le 02 prairial an VII (21 mai 1799). Barras, président et Lagarde secrétaire général du directoire exécutif, sur le rapport du ministre de la police générale Duval, décide de la maintenir « définitivement sur la liste des émigrés » , de saisir ses biens meubles et immeubles et de les vendre au profit de la République, et de lui interdire de rentrer sur le territoire de la République. Il s’appuie entre autres sur une « dénonciation signée, adressée au ministre de la police générale le 26 pluviôse an VII (14 février 1799), dans laquelle il est dit que la femme MIREMONT n’est partie que dans l’automne 1789, qu’il est vrai qu’elle a parcouru l’Italie, mais qu’elle a plus fréquenté l’Allemagne, et que la prévenue est encore en Hesse ». Le dénonciateur est bien renseigné et ses affirmations sont exactes. La principauté de Waldeck est enclavée dans le territoire de la Hesse. Le directoire justifie sa décision en quatre :
 
« 1 - La réclamante ne justifie pas d´une manière authentique, de l’époque précise où elle est sortie de France.
 
2 - Elle a fait depuis son absence, de longs séjours dans des pays en guerre avec la République et pendant la durée des hostilités.
 
3 - Elle ne prouve pas d´une manière légale, s´être livrée exclusivement à l’étude des sciences et belles-lettres, et ne s´être absentée que pour acquérir de nouvelles connoissances.
 
4 - Son passeport indique au contraire qu’elle n´a quitté la France que pour aller prendre les eaux à Pise ».
 
            Le 21 floréal an VII (10 mai 1799), l’administration centrale de la Marne a cependant pris un arrêté de liquidation au profit de Madame de MIREMONT d’une créance d’unecréance de 3.000 livres de rente perpétuelle au principal de 60.000 livres sur l’émigré Alexandre Nicolas Pierre de Fougères de Courlandon, qui avait donc été comprise dans l’état de rente perpétuelle sur émigrés .
 
            Le 22 messidor an VII (10 juillet 1799), Monsieur de MIREMONT écrit une lettre dans laquelle il déclare que sa femme «  étant sur la liste fatale, il ne peut ni ne doit profiter de cette liquidation des 60.000 F qui font sa dot ».
 
            Le15 messidor an VII (3 juillet 1799), en application des arrêtés du directoire exécutif et de l’administration centrale de l’Aisne, l’administration municipale du canton de Sissonne fait une nouvelle perquisition au château de Coucy-lès-Eppes et, indique qu’elle ne peut rien ajouter à ce qu’elle a déjà constaté en 1795.
 
            Le 05 floréal an VIII (25 avril 1800)Monsieur de MIREMONT fait une reconnaissance de dette à « Jean Jacques Accarias De SERIONNE, homme de lettres demeurant à Amiens, rue du Collège » , dette de 12.495 F remboursable en 5 ans. Le 7 mai 1800, Monsieur de MIREMONT «révoque la procuration par lui donné à Anne Marie Madeleine DAUBOURG son épouse, icelle passée devant DELIANCOURT, notaire à Montaigu, le 04 janvier». A la lecture de ces deux faits, on peut comprendre que Madame de MIREMONT a emprunté de l’argent à son ami Monsieur de SERIONNE pendant son séjour à l’étranger et qu’elle lui a fait une reconnaissance de dette en s’appuyant sur la procuration de son mari. En 1793, Monsieur de SERIONNE a publié la traduction d’un livre italien à La Haye et, en 1799, la traduction d’un livre allemand à Gotha. Il vient donc de rentrer en France.
 
            Le 19 floréal an IX (9 mai 1801), François BOER et Christine BIRASTE sont rayés de la liste des émigrés. Le 28 prairial an IX (17 juin 1801), il en est de même de Madame de MIREMONT. Le 09 messidor an VIIII (28 juin 1801), elle prête serment de fidélité à la Constitution. Elle vient donc de rentrer en France. Dès le 30 juin, elle présente une pétition pour requérir sa rente au Préfet de la Marne, sur conseil du préfet de l’Aisne DAUCHY. Cette lettre est datée de Coucy-lès-Eppes. A cette lettre est jointe une deuxième lettre que nous publions en entier:
 
            « Coucy les Eppes, près Laon
            à Laon ce 11 messidor an IX
            Citoyen Préfet,
 
            La pétition que j’ai l’honneur de vous adressé, paroît toute simple dans son objet ; mais je crains que vous n’y trouviez au fond quelque difficulté, quand vous aurez vu la dernière pièce, dont je m’abstiens de parler dans ma pétition, et dont je dois vous dire un mot ici, avec confiance. Je sais à combien de titre vous méritez ce sentiment ; et Monsieur DAUCHY ne m´a point étonné en me conseillant de solliciter franchement vôtre équité, sans employer d’autres bons offices que les siens, en n’espérant toute fois que cette lettre vous sera remise directement par quelqu’un que vous considéré.
 
            A mon retour, après une agonie de douze ans, un homme d´affaire, dont vous ne comprendrez pas plus que moi, l’indéfinissable procédé, m´a remis une expédition, (très bonne à brûler) du certificat que je vous demande aujourd’hui, laquelle se termine par l’énoncé d’une lettre de mon mari, en date du 22 messidor an VII (10 juillet 1799), portant en substance, que je suis sur la liste fatale, et qu´il ne peut ni ne doit profiter de cette liquidation des 60 000 F. qui font ma dot.
 
            Mon mari, accablé de vieillesse, n´a pas entendu livrer à la République, une partie de ma dot, qu´on ne lui demandoit pas ; puisque ma qualité de femme de lettres, et la notoriété de mon voyage avant la révolution, m´a placée dans les exceptions, légales. Tel est cependant le danger que j´ai couru par son fait, ou par les suggestions d’un très mal habile, ou mal intentionné.
            J’ose vous supplier Citoyen Préfet, d´y remédier en m’accordant l’expédition d’un certificat pur et simple, afin que rien ne porte ombrage au liquidateur de la dette publique.
            Agréer, Citoyen Préfet, les assurances de ma haute considération.
 
 
            Cette lettre, écrite dès son retour, montre pour la première fois la nature des divergences avec son mari.
 
            Le 28 messidor an IX (17 juillet 1801), nous apprenons par un brouillon de lettre du préfet de la Marne qu’il est favorable à la délivrance du certificat de liquidation de la rente et conseille à Madame de MIREMONT de s’adresser au directeur général de la liquidation à Paris.
            Le même jour, nous apprenons par un acte postérieur, qu’elle a pris sur son mari une hypothèque en garantie d’une somme de « 5.250 livres tournois » (Jusqu’à sa mort, Madame de MIREMONT a utilisé les monnaies et les valeurs d’ancien régime). Le 01 fructidor an IX (20 juillet 1801), elle est autorisée par le tribunal civil de Laon « à la poursuite de ses droits » . Le (19 août 1801), elle comparait devant le juge de paix de Sissonne pour demander une séparation de biens, à cause « du dépérissement progressif des affaires et de la diminution sensible des biens et revenus » de son mari (Voir le texte intégral dans le Cahier d’histoire de Mauregny N°1 - page 11). Elle prétend que ce dépérissement est la conséquence de l’abandon de la gestion par son mari « à des mains soit inexpertes, soit infidèles » . Son mari répond « que des préjugés ou des passions l’ont égarée sur ce point » . Cette accusation de préjugés est-elle d’ordre politique ? Les conseillers de Monsieur de MIREMONT étaient des bourgeois (au sens de l’époque).
 
            Le 28 fructidor an IX (15 septembre 1801, Monsieur de MIREMONT arrête ses comptes avec François BOËR et le 18 frimaire an X (9 décembre 1801), il lui signe une reconnaissance de dette de « 4.000 livres tournois prêtées par ledit BOËR à la Dame MIREMONT son épouse en 1789 (V.S.Q. : que pour restant des gages qu’elle lui devoit) » remboursable en huit ans et gagée par une hypothèque sur des domaines à Coucy-lès-Eppes
 
            En ce mois de décembre 1801, Monsieur de MIREMONT a soixante-dix-sept ans et sa femme en a soixante-sept. C’est alors, que le 18 germinal an X(8 avril 1802), elle fait sa demande de divorce. Dès le 09 floréal an X (22 avril 1802), elle habite Laon.
 
            Le 19 floréal an X (09 mai 1802) a lieu la première assemblée de parents et amis. Ses témoins sont :
·      BREHERET Montalard, propriétaire, demeurant à Lizy,
·      Guillaume Angou MOLLET, docteur en médecine,
·      Antoine Narcisse HENNECART, avoué, demeurant à Laon.
            Ces deux derniers remplacent pour cause d’empêchement :
·      Chatenest PISIGARE, maire de Soissons,
·      André SIMON, demeurant à Laon.
Tous deux commissaires du gouvernement au tribunal criminel de l’Aisne.
 
·      Anne Claude BREHERET, ancien écuyer et seigneur de Montalard est le châtelain de Lizy où il a acquis soixante-dix pour cent des domaines nationaux. Il est maire de Lizy de 1800 à 1803 [Maxim de Sars : La communauté de Lizy].
 
·      Guillaume MOLLET est le médecin de Madame de MIREMONT, qui la soignera jusqu’à sa mort. C’est un médecin laonnois. L’inventaire des archives de Laon mentionne une « lettre de MOLLET, médecin, faisant connaître la mort d’AUMALE père, détenu avec sa famille » dans un foyer putride et demandant le transport dans un air plus salubre  « des débris de cette famille infortunée ». A la mort de Madame de MIREMONT, il habite 24, rue Neuve du Luxembourg à Paris.
 
·      Quant à Narcisse HENNECART, son nom apparaît dans de nombreux actes notariés concernant Madame de MIREMONT.
 
            D’après un document du « 2ème jour du second mois de l’an II (2 brumaire an II - 23 octobre 1793) », Antoine Narcisse HENNECART est membre du conseil général de la commune de Laon. A la même époque FLEURY nous apprend que les sections et les clubs de Laon « crurent reconnaître dans le citoyen HENNECART, membre de la commune, l’auteur de l’acte de pusillanimité reproché au corps municipal. Les sections déclarèrent qu’il avait perdu leur confiance... le conseil n’osa retenir HENNECART », mais, il «  déclara qu’il emportait le regret de ses collègues[Le clergé dans l’Aisne pendant la Révolution - Tome I - pages 385/386] ».
 
            Les 22 et 28 prairial an X (11 et 17 juin 1802), il y a un jugement pour la répartition des biens et le 28 prairial an X (2 juillet 1802), un « inventaire prisé et estimation des meubles et effets réclamés par Dame Anne Marie Madeleine d’AUBOURG à Thomas Exupert François de MIREMONT » . Il y a en effet contestation sur la propriété des meubles et en particulier des livres de la bibliothèque. Les meubles déjà emmenés à Laon par Madame d’AUBOURG de MIREMONT sont estimés à 3.408 F. Elle estime nécessaire de préciser que « dans le secrétaire doit se trouver le tel des papiers avec celui des arrérages dus sur les trois terres lors de mon départ en 1789 ». Elle réclame aussi les bustes en plâtre de Voltaire et de Jean Jacques (Jean Jacques ROUSSEAU sans doute). Quant à Monsieur de MIREMONT, il répond « que tous les effets réclamés par son épouse étaient la suite de son projet d’envahir sa fortune tant en meubles qu’immeubles». C’est là une nouvelle preuve de la nature des divergences qui les oppose (en tous cas au moins une partie de ces divergences).
 
            Le 20 messidor an X (9 juillet 1802) , deuxième assemblée de parents et amis. Deux nouveaux témoins apparaissent pour Madame d’AUBOURG :
·      Jean Baptiste LOURDET de Santerre, homme de lettre, demeurant à Paris,
·      Jean Simon LEFEVRE, demeurant à Laon.
           
Jean Baptiste LOURDET de Santerre (1752 - 1815) est un auteur dramatique qui a écrit plusieurs comédies et opéras comiques. C’est aussi un Sieur « LOURDET, professeur royal » qui a donné son approbation à la parution le 15 juin 1778 du premier volume du « Traité d’éducation des femmes » - Est-ce le même ? [Fédération des Sociétés d’histoires et d’archéologie de l’Aisne - De Buttet - Mémoires - Tome XXXIV - 1989 - p87]
 
            Le 10 thermidor an X (30 juillet 1802), Alexandre Pierre Nicolas de FOUGERES, dit Courlandon, émigré en 1792, est amnistié. Un brouillon non daté, dans le même dossier, fait état des créances dues par Monsieur de FOUGERES, en particulier « à Madame de Miremont au principal de 60.000 livres produisant 3.000 livres de rente en 3 versements ainsi qu’il est approuvé par ledit contrat » .
 
            On peut donc penser que Madame de MIREMONT a retrouvé sa rente comme le montre aussi un autre document en date du 02 messidor an (21 juin 1802) X :
 
            « Fut présent, citoyen Thomas Exupert François De MIREMONT, propriétaire, demeurant à Coucy les Eppes, au nom et comme mary et bail de Dame Anne Madeleine DAUBOURG, son épouse.
 
            Lequel a fait et constitué pour son Procureur général et spécial la personne de : .....(blanc.....
 
            Auquel je donne pouvoir de pour lui et son nom requérir et poursuivre près du liquidateur de la dette publique l’inscription sur le grand livre d’une créance de 3.000 F due, originairement à titre de constitution par Sieur COURLANDON et aujourd´huy due par la République comme représentant ledit Courlandon, toucher et recevoir les arrérages de laditte rente en donner quittance consentie à la réduction de laditte rente au tiers consolidé et généralement faire pour raison de laditte inscription tout ce qui sera nécessaire, promettant l’avouer et ratifier ce qu´il fera.
 
            Comme aussy poursuivre le payement et liquidation d’une obligation de 24 000 F/Tournois, due par un citoyen DURVIZ, souscrire à tout contrat d’atermoyement, remise ou modération de laditte créance... ».
 
            Le 21 vendémiaire an XI (12 octobre 1802) à lieu la troisième assemblée de parents. Madame de MIREMONT demeure à Soissons
 
            Le 22 germinal an XI(12 avril 1803) , le divorce est définitivement prononcé à Coucy-lès-Eppes « pour incompatibilité d’humeur et de caractère » . Monsieur de Miremont, comme aux autres assemblées, est « non comparant ».
 
 
            Madame de MIREMONT, va reprendre son nom de jeune fille : Madame d’AUBOURG, dans les actes officiels, mais elle signera Madame d’AUBOURG de MIREMONT.
 
            Le même jour, 22 germinal an XI (12 avril 1803) :
 
            « Marie Madeleine d’AUBOURG... reconnaît avoir reçu dudit Citoyen MIREMONT la somme de 5.259 Francs et soixante-deux centimes, numéraire métallique, laquelle somme à l’instance comptée, nombrée et réellement délivrée à ladite Dame d’AUBOURG, savoir 740 Francs 62 pour liquidation de la pension que ledit Citoyen MIREMONT payé à ladite Dame d’AUBOURG échu le 1er du présent mois faute cependant de l’apport dudit Citoyen MIREMONT pour ce présent, aucune approbation de ladite pension qu’il n’entend plus payer que sur la pièce de 2.000 livres au moyen de la non liquidation de la rente due pour la République et dont il a été question entre ladite Dame d´AUBOURG et ledit Citoyen MIREMONT, faisant à cet égard ledit Citoyen MIREMONT toutes réserves de se pourvoir en restitution de ce qu’il a déjà payé au-delà de ladite somme de 2.000 Francs. Sous toutes protestations contraires que fait ladite Dame d´AUBOURG.
            Et la somme de 4.442 Francs à valoir sur les reprises et conventions
matrimoniales de ladite Dame d´AUBOURG, sans néanmoins préjudicier aux ....? que doit la terre, soit droits et prétentions des parties ».
 
            Le lendemain, « le citoyen SERIONNE, homme de lettres et juge suppléant au tribunal civil de Soissons » reconnaît avoir été payé par Madame de MIREMONT.
 
            Le 25 fructidor an XI (12 septembre 1803), Madame d’AUBOURG reçoit 33.000 Francs de son ex-mari et le même jour elle prête 25.000 livres à Jean Louis MENNESSON, propriétaire à Laon.
 
            Le citoyen BOËR reçoit 4.157 Francs de Monsieur de MIREMONT.
 
            Le 21 brumaire an XII (13 décembre 1803), Madame d’AUBOURG reçoit encore 4.420 Francs.
 
            Le 16 fructidor an XIII (3 septembre 1805, Dame d’AUBOURG donne procuration à HENNECART, avoué à Laon, pour une « instance actuellement pendante au tribunal de première instance de Laon ».
 
            Le 19 juillet 1806, il y a un arrêt de la cours d’appel d’Amiens condamnant le Sieur DEMIREMONT à payer à la Dame D’AUBOURG la somme de 9.876 Francs (10.000 livres tournois en numéraire).
 
            Le 8 novembre 1806, HENNECART, procureur de Dame d’AUBOURG, réclame à Jean Louis MENNESSON, propriétaire et Suzanne BEUZART, son épouse, demeurant à Laon, 25.000 livres prêtées le 25 fructidor an XI (12 septembre 1803), à rendre en 4 ans. Cette dette est transformée en rente viagère de 4.000 livres tournois, payable de 6 mois en 6 mois jusqu’au décès de ladite Dame d’AUBOURG.
 
            Le 18 novembre 1806, Madame d’AUBOURG reçoit « la somme de 9.876 Francs (10.000 livres tournois en numéraire) » en déduction de celles dues par son ex-mari.
 
Le 01 octobre 1807 :
 
            « Le Sieur Louis Tranquille CARPENTIER, négociant, demeurant à Paris, propriétaire de la manufacture de vitriol et d’alun établie à Chailvet étant ce jour audit Laon, lequel reconnoit pour le besoin de ses affaires.
 
            Dame DAUBOURG, épouse divorcée de Monsieur Thomas Exupert François DEMIREMONT, demeurante à Soissons lui a présentement prêté la somme de 6.913,58 Francs représentant 7.000 livres tournois en numéraire écus. De laquelle somme à lui comptée par Maitre POULLET, il se tient pour content promet, s’engage et s’oblige de la rendre et rembourser à ladite Dame DAUBOURG DEMIREMONT dans 3 ans de ce jour fixé et jusqu’à cette époque de lui payer annuellement l’intérêt à 5% et exempte de toute retenue quelconque, lesquelles paiements seront faits en son domicile à Soissons ou en l’étude dudit Notaire Poullet, en même espèce d’or et d’argent et non autrement et dont la 1ère échéance au ler octobre prochain 1808.
 
            Hypothèque sur les terres de Chailvois ».
 
            Ce document montre que Madame d’AUBOURG s’intéresse toujours à la production et aux cendres noires en particulier.
 
            Le 6 mars 1808 :
 
            « Antoine Narcisse HENNECART, fondé de la procuration de Dame Anne Marie Madeleine DAUBOURG, divorcée du Sieur Thomas Exupert François DEMIREMONT, demeurant à Coucy les Eppes, elle domiciliée à Soissons. Procuration passée devant POULLET le 16 fructidor an XIII (03 septembre 1805), annexée à la quittance du 18 novembre 1806, enregistrée le 26). A reçu du Sieur DEMIREMONT par LAURENDEAU avoué à Laon son fondé de pouvoir, la somme de 11.851 Francs représentant 12 000 livres tournois en numéraire, savoir... (décomptes des dates et sommes...) liquidation de ses reprises faites par les Sieurs VARLET et LAURENDEAU, avoués à Amiens, en exécution d’un arrêt de la Cour d’Appel séante à Amiens le 12 Aoust 1807, décharge pleinement et entièrement le Sieur Thomas Exupert François DEMIREMONT de ladite somme de 12 000 livres formant le restant dû à ladite Dame DAUBOURG pour solde de ses reprises matrimoniales liquidées en exécution de l’arrêt de la Cour d´Appel du 12 Aoust dernier...
            Main levée d´hypothèque du 26 messidor an IX (15 juillet 1801) ».
 
            C’est alors seulement que le divorce est enfin complètement liquidé.
 
            C’est en 1808 également que, nous dit Monsieur de BUTTET, fut réédité le roman autobiographique de Madame de MIREMONT : Les Mémoires de la marquise de Crémy » chez L. COLLIN à Lyon - 3 volumes in 12.
 
            Le 1er septembre 1809, Jean Baptiste Toussaint FERTé à constitué 444 Francs 40 ou 450 livres de rente viagère à Anne Marie Madeleine DAUBOURG, payable de six mois en six mois, jusqu’à son décès - 3.000 livres au principal payé par ladite dame DAUBOURG .
 
            Le 18 octobre 1809, Monsieur François FLESCHEMER, marchand à Soissons, a reconnu devoir à Anne Marie Madeleine DAUBOURG, demeurant à Soissons, 1.975 Francs ou 2.000 livres, jusqu’au 18 octobre 1812 - intérêt 5% à cette date.
 
            Le 01 avril 1810, elle rédige son deuxième testament.
 
            Le 13 septembre 1810, elle écrit :
 
            « à Monsieur POULLET, notaire, rue du Blocq à Laon.
 
            Salsogne, Samedi 13 septembre 1810.
 
            Votre lettre du 13 m´arrive aujourd´hui à la campagne. Soyez tranquille, vous recevrez toutes les pièces que vous désirez avant l´échéance, et j´espère que comme de coutume vous ménagerez mes intérêts.
 
            Je profite d´une occasion pour Braine pour répondre et vous renouvelle les assurances de tous mes sentiments.
 
            J´ai l´honneur d´être Monsieur votre très humble servante.
Signé :             D´Aubourg De MIREMONT.
 
            Quel est cette année le taux de l´argent chez vous? S´il vous plaît ».
 
            Le 21 septembre 1810, elle écrit :
 
            « Me voici de retour, Monsieur, voilà la procuration que vous me demandez pour toucher la rente et les fonds qui me sont dus par Monsieur CARPENTIER, je craignais de perdre la différence des écus anciens, on m´assure que non, je m´en rapporte à vos soins, je joins l´expédition du contrat à la procuration, veuillez m´en accuser la réception.
 
            La différence de la monnaie en francs me fait craindre que vous me puissiez m´envoyer une description, car hyer j´écrivis au bureau de Monsieur MUET (HUET) pour changer des écus de 6 Livres en Francs, il me répondit qu´il n´en avoit point. Ce seroit cependant la manière la moins dispendieuse. Veuillez m´aider à cet égard. Il sera placé à m’apporter à 8 pour cent et payé le jour de l’échéance ce qui est chose commode et douce.
 
            Je vous renouvelle, Monsieur les assurances de tous mes sentiments et vous prie de me croire toujours bien reconnoissante de tous vos soins et bien sincèrement votre très humble et très obéissante servante.
 
                        D´Aubourg de MIREMONT
 
 Soissons, ce Vendredi 21 septembre 1810.
 Veuillez je vous prie, m´accuser, réception du paquet ».
 
            Le 02 octobre 1810, on trouve une  :
 
            « Obligation de 7.000 Francs souscrite par Antoine Pierre LETELLIER, contrôleur des droits réunis à Soissons au nom de Mme De Miremont, passée par acte devant SAILLET, notaire impérial à Soissons ».
 
            Le 24 janvier 1811, dans un dossier concernant les usines de Chailvet nous trouvons les précisions suivantes :
 
            « Aux créanciers hypothécaires et privilégiés inscrits tant sur les 3 usines et dépendances que sur les autres biens vendus en général, la somme ci-après, savoir:
 
            - A Mademoiselle Julie LEMAIRE, dite Laure demeurante à Laon, 8.100 Francs pour le montant de son obligation passée devant POULLET ledit notaire le 15 octobre dernier portant subrogation par Anne Marie Madeleine DAUBOURG, veuve DEMIREMONT, demeurante à Soissons, aux droits résultant de son inscription du 15 octobre 1807 Vol. 32 N°369. Ladite somme payable dans 2 ans sans intérêt d’un montant de 8.100 Francs à Monsieur MOLLET, docteur en médecine, 60.000 Francs et les intérêts depuis le 20 décembre dernier résultant d’une obligation passée devant DECOURCHANT Jean Baptiste Auguste 1807/1816 et son collègue notaires à Paris le 20 décembre 1808, inscrite le 23 du même mois Vol. 36 N°502 à Monsieur Martin RIBAUX avocat demeurant à Versailles ».
 
            On le voit, non seulement Madame d’AUBOURG continue à s’intéresser aux affaires, mais elle y intéresse ses amis, notamment son médecin personnel : Monsieur MOLLET.
 
            Le 5 avril 1811, elle décède à Soissons.
 
            Voici son testament :
 
Sur une petite page est mentionné :
 
En marge :
Paraphé ne variéture à Soissons ce 05 avril 1811. Signé : Bernier.
 
In nominé patris et filis et spirtus sancti amen.
 
            Ce ci est le testament de moi Anne Marie Magdeleine d´AUBOURG de MIREMONT, femme forcée au divorce ; qui ne fut jamais ni dans ma religion, ni dans mon coeur. Je déclare que j’ai vécue, et que je veux mourir dans la religion catholique apostolique et Romaine. Je demande à n’être enterrée que trente six heures après mon décès, à moins d’une putréfaction prématurée, car je ne veux être importune à personne, même après ma mort. Je veux que l’enterrement soit calqué sur celui du plus pauvre des artisans et je donne aux pauvres de mon quartier les cent écus, qu’auroient pu coûter mes obsèques. La distribution en sera confiée à Me de GENLIS, que je supplie de me rendre ce dernier service. Il la fera penser encore une fois à moi, ce qui me fait plaisir à espérer. II Renvoi : Qu’on ne croye pas que je reste sans prières. En renvoyant ma croix, et mon diplôme à la chancellerie de l’ordre de Vienne, j´aurai un grand service, et autant de messes basses qu’il y a de Dame de la Croix Etoilée.
 
            Je lègue à mon ami le moins fortuné, le ci-devant Chr de THUREY, né dans le département du Doubs, l’argent comptant et l’argent placé en rentes annuelles, qui restera, après avoir rempli les legs suivants. Article dont je charge spécialement mon exécuteur testamentaire.
 
1° - Avant toute délivrance de legs en argent comptant, ou en argent placé, les dettes que je me trouverai avoir, seront acquittées, mais j’espère n’en point faire.
2° - Je déclare que par la dénomination de mobilier légué, ou donné ci-après, je n’entends jamais, ni l’argent comptant, ni l’argent placé, dont je réserve de faire des dispositions particulières. Cela expliqué et entendu, je donne et lègue à :
 
Christine BIRETTE, ma femme de chambre, si elle est encore à mon service, comme je l’espère, tout ce qui s’appelle meuble meublant, linge de toutes espèces, argenterie, flambeaux argentés, porcelaines, batterie de cuisine, ma garde robe, y compris mes dentelles, ustencils de maison et de jardinage ; le bois de chauffe alors existant, ainsi que toutes espèces de vins et liqueurs même les bouteilles vides, carafes et verreries en un mot tout ce qui m’appartient en mobilier et en reprise ou réclamation de construction, comme poêle de sable, refend du cabinet les commodités en tuyaux de plomb. Enfin tout ce dont je n´aurai pas disposé séparément, j’observe encore que si part hasard il se trouvait trop peu d´argent comptant, et pas assez d’exactitude dans la rentrée des rentes à échoir, alors je compte sur l’activité de BIRETTE, pour choisir ce qu’elle voudra garder de meubles et pour vendre le reste, parce que s’il y avait des dettes à payer, mon exécuteur testamentaire, pourroit lui échanger l’argent de la vente, contre une même valeur de fonds placés, dont il seroit trop long d’attendre le remboursement. J´impose cet arrangement comme avantageux pour elle, et comme facile pour l’accélération des affaires.
 
3° - Je donne de plus à ladite BIRETTE une somme de cinquante Louis, prise sur l’argent placé, pour l’aider à attendre les rentes qu’elle formera II Renvoi nota : j´ai remis à Mr VERNIER un testament pareille à celui cependant je crains de m’être trompé sur l’article de l’argent comptant et d’y avoir stipulé deux mille francs au lieu de cinquante Louis, auxquels je me suis réduite, parce que j’ai augmenté le mobilier.
 
4° - Il sera placé sur la tête de laditte BIRETTE, et sur celle de Nicolas LEFEVRE, dit « Lajeunesse » , aussi à mon service et s’il y reste, la somme nécessaire pour former une rente viagère de quatre cent Livres, dont Nicolas jouira seul sa vie durant, s’il est encore à mon service et dont BIRETTE héritera si elle lui survit. De cette manière, ils seront indépendants l’un de l’autre. Mais s’il leur reste un peu de respect pour mes volontés, BIRETTE et Nicolas resteront ensemble pour le plus grand avantage des deux, car le pauvre vieillard seroit mal chez ses parents, qui mangeroient sa rente. Je le recommande à mon exécuteur testamentaire et tant qu’il vivra à sa surveillance, car je ne veux pas qu’il retourne au village et je désire qu’il ne soit pas tourmenté, sa malheureuse tête a besoin de guide.
 
5° - Il sera de plus délégué sur les fonds placés une somme de quatre mille livres à François BOER, dit « l´Allemand » s´il est encore à mon service, pour en disposer à l’échéance du remboursement, comme il voudra et pour jouir de la rente, à datter du jour de mon décès, règle qui sera également observée pour BIRETTE et COLAS, auquel je donne encore ce qui peut me rester d’habits d’homme, linge et bottes, ainsi que le petit mobilier de sa chambre. L´Allemand gardera également ce qui peut m’appartenir dans la sienne.
            J´aurois désiré pouvoir mieux récompenser leurs longs et bons services à tous trois, car il est impossible de trouver de plus dignes serviteurs, et de plus honnêtes gens. Mais la fortune a rétrécie tous mes moyens. S´ils vivent ensemble tous les trois, comme je le désire, et le leur conseille, ils peuvent encore être heureux.
 
6° - Je destine sur les autres fonds placés ou sur les rentes échues une somme de mille Livres à l’impression de mes mémoires philosophiques, tels qu’ils sont écrits de ma main ayant été revus et corrigés. Si cette petite somme peut être prise en partie sur les rentes échuses, et une partie sur le prix de mes deux montres d’or avec leurs chaines, j’en serai bien aise. Sinon on prendra ce qui manquera sur l’argent placé. Ces mémoires, seront mises en vente, comme tout autre ouvrage, et le produit retournera à une amie connue de Mr de GENLIS et de moi, ma bonne et aimable R...R que je n’ose pas nommer pour un si mince objet.
 
7° - I1 sera encore prélevé une somme de deux mille Livres sur les fonds que je laisserai, pour mon excellent ami Christophe de POMPERY demeurant à Salsogne, pour acquitter une dette de l’amitié la plus tendre et la plus solide qui ait jamais existée, et si j’avois le malheur de lui survivre, cette dette seroit payée selon ses désirs à Mlle Marie de POMPERY, sa petite nièce encore enfant demeurant à (Couvrelles).
 
8° - Je donne et lègue à mon amie Mde de SABRAN, mon atlas de voyage et celui de (Mornot) que je prie d’accepter, ainsi que ma grande louppe anglaise, qui l’aidera à les lire, en la tenant fort en avant de ses lunettes. Je supplie aussi cette aimable et excellente amie, qui a fait la consolation de mes vieux jours de vouloir bien accepter en souvenir de notre intimité, ma bague tête antique qui me tiendra encore prétexte à son souvenir.
 
9° - Je donne et lègue à Mr de SERIONNE, mon enciclopédie, et les livres hors de la portée de BIBIE ou BIRETTE. Ainsi que mes manuscrits et autres dont il est plus à porté de tirer partie, ce sera un moyen de plus de le rappeller à l’ancien attachement dont il m’a donné tant de preuves dans le cours de nos voyages.
 
10° - Je donne et lègue ma voiture et ce qui peut en dépendre à Mr MOLLé, docteur en médecine à Paris, Rue Neuve du Luxembourg, N°43. C’est dans cette intention que j’en ai renouvellé les roues, et que je l’ai fait remettre à neuf, je le prie d’accepter cette faible marque de ma reconnaissance, comme un désir d’être rappellée encore quelques fois au souvenir du bien que ses conseils ont fait à ma santé.
 
11° - Sur ce, je prie mon bon et ancien ami Christophe de POMPERY, demeurant à Salsogne de vouloir bien exécuter mes dernières volontés ; d’envoyer un exemplaire de mes mémoires à Mde de BERCHER, St-Cierges à Lausanne et d’y joindre ma bague en cheveux dans laquelle il fera mettre des miens en place de ceux qui y sont.
 
12° - I1 enverra à Mde de GALIFFET, à Aix en Provence, ma petite chaîne d’or qui se met en forme de bague, et mon couteau à lame d’or, qu’elle voudra accepter comme dernier gage de notre amitié.
 
13° - I1 enverra de même à mon ancienne amie Mde CORNY, à Paris, ma bague fond bleu en yvoire, désirant que ces bagatelles puissent me rappeler au souvenir de mes tendres amies.
 
            Je regrette que mon imperceptible fortune, ne me permette plus d’offrir à toutes les personnes qui m’ont accordé une part de la leur. Je leur dois à toutes le seul bonheur dont j’aye jamais jouie en ce monde. l’amitié et la reconnoissance, sont deux sentiments, qui me suivront au tombeau.
 
            Qu’on ne pense jamais à Lucquy, Pise, Florence, Carlsruhe, Arolsen, non plus qu’à Soissons, que j’aye perdu un instant, le souvenir de l’amitié avec laquelle on bien voulu m’y acqueuillir. Si j’emporte un regret en terminant une carrière beaucoup plus longue que je ne devois l’espérer, c’est celui de n’être plus rappellée au souvenir de mes amis, et surtout de ceux que j’ai laissé en pays étrangers, car qui leur parleroit des sentimens que je leur conserve! Mais j’ose me flatter de vivre dans celui de l’aimable comtesse d´ALBANIE, elle qui sait si bien aimer, et que je porte dans mon coeur.# Renvoi : Je prie mon exécuteur testamentaire de vouloir bien lui faire part de ma mort : Quai d´Arno à Florence en Toscane - Mais c’est au prince et à la Princesse de WALDECK que tous les François doivent élever des Autels, et offrir autant d’actes d’amour, que de reconnoissance.
 
            Dans le cas où mon bon ami Christophe de POMPERY ne pourrait pas exécuter mes dernières volontés, je supplie Mr VERNIER qui m’a donné tant de marques d’attachement de vouloir bien me rendre ce dernier service. S’il en était empêché, c’est Mr BERNIER, habitant à Soissons et Ciry-Salsogne, que je supplie de ne pas me refuser ce dernier service. J’espère aussi, que celui de ces Messieurs, qui me le rendra voudra bien accepter mon grand porte feuil à secret, garni en argent et le garder en mémoire de moi.
            J’annule tout testament ou codicille fait jusqu’à ce jour.
            Le tout fait en triple, de même datte, et écrit de ma main sans suggestion de personne.
 
            A Soissons, rue de l´Hotel Dieu, ce 01 février 1808 et quatre renvois approuvés ainsi que l’entreligne.
 
            La lecture de ce testament donne encore quelques éléments pour comprendre la personnalité de Madame de MIREMONT.
 
            Elle déclare avoir été « forcée au divorce ». Elle désire que son « enterrement soit calqué sur celui du plus pauvre des artisans » . Elle est d’une sollicitude très attentive pour ses domestiques.
 
            La liste des personnes citées dans ce testament achève de la situer dans la société de son temps : Madame de SABRAN, Monsieur de SERIONNE, Monsieur MOLLET, Monsieur THUREY, Madame de GALIFFET, Madame CORNY, la comtesse d’ALBANY, le Prince de WALDECK, Madame BERCHER Saint-Cierges, Monsieur de POMPERY, Madame de GENLIS.
 
            Nous n’avons aucun renseignement sur plusieurs d’entre eux .
 
            Madame de Genlis (1746 - 1830) est une femme de lettre célèbre qui a écrit quatre-vingts ouvrages se rapportant presque tous à l’éducation. Elle a aussi émigré de 1792 au Consulat.
 
 
            Quant à Madame de BERCHER Saint-Cierges, nous avons pu établir grâce aux recherches de Monsieur Gilbert CONTAZ, archiviste de la ville de Lausanne[3], qu’il s’agissait de Françoise BIBAUD, épouse de Philippe de SAUSSURE, Seigneur de Bercher. D’après deux lettres du docteur TISSOT, cette Madame de BERCHER Saint-Cierges jouait la comédie avec Madame de MIREMONT en 1775 à Lausanne[4] .
 
            Enfin dans ce testament, elle se plaint «  la fortune a rétréci mes moyens ». Elle parle aussi de son «  imperceptible fortune ». Pourtant l’inventaire de ses biens montre qu’elle résidait à Soissons, rue de l’Hospice (rue aujourd’hui disparue) dans une maison de 13 pièces, dont le mobilier était estimé à 14.700 Francs. Et elle avait trois domestiques.
 
 
Soissons
 
 
Inventaire après décès des biens de Madame de MIREMONT:
 
 
N°175
L´an 1811 le 6ème jour de mai, 09 heures du matin.
            A la requête,
            De Monsieur François Adrien LIEBERT, avoué près le tribunal civil de première instance de l’arrondissement de Soissons, demeurant en cette ville.
            Stipulant au nom et comme fondé de procuration générale et spéciale à l’effet des présentes de Monsieur Alexandre Nicolas Pierre De FOUGERES, propriétaire, demeurant à Sévigny-Waleppe, canton de Château Porcien, arrondissement de Rethel, département des Ardennes ; passée devant Maître BONDE, notaire impérial à Fismes, en présence des témoins y dénommés, le 13 avril dernier, enregistré audit Fismes le même Jour. Le brevet original de laquelle procuration, après avoir été certifié véritable par ledit Maître LIEBERT, en présence des notaires soussignés, est demeuré annexé à ces présentes.
            Ledit Sieur De FOUGERES est ici représenté en sa qualité d’habile à se dire et porter héritier de feüe Madame Anne Marie Madeleine DAUBOURG, sa cousine, décédée à Soissons le 05 avril dernier, Veuve de Monsieur Thomas Exupert François De MIREMONT.
            En sa présence et du consentement :
            1° - de Monsieur Charles Jérome Laurent VERNIER, Procureur impérial audit tribunal civil de première instance de l’Arrondissement de Soissons, demeurant en cette ville.
            Au nom et comme Exécuteur Testamentaire de ladite Dame DEMIREMONT, suivant son testament olographe en date du 01 février 1808, ouvert par Monsieur BERNIER, l’un des juges civils dudit Tribunal, pour empêchement du Président, suivant procès-verbal dressé au greffe de ce tribunal le 05 avril dernier, et enregistré ledit testament dûment enregistré à Soissons le 06 du même mois d’Avril par PEIGNé, et déposé en l’étude de Maître RIGAUX, l’un des notaires soussignés, suivant acte de dépôt reçu par lui et son collègue le 11 dudit mois d’avril, et aussi enregistré.
            Il est aussi observé que mondit Sieur VERNIER, Exécuteur Testamentaire, remplace suivant le vœu de la testatrice, Monsieur Christophe De POMPERY, propriétaire demeurant à CIRY-SALSOGNE et Maire de cette commune, canton de Braine, arrondissement de Soissons, nommé premier Exécuteur Testamentaire, au moyen de démission que celui-ci à faite de cette fonction officieuse pour les motifs expliqués en l’acte sous seing privé qu’il a souscrit à cet effet le 15 du même mois d´avril, dûment enregistré à Soissons le 01 mai, présent mois. Lequel acte de démission demeurera annexé à ces présentes pour y avoir recours au besoin.
            2° - De Monsieur Louis François Alexandre Calixte DUHAL, propriétaire demeurant à Soissons.
            Au nom et comme fondé de la procuration générale et spéciale à l’effet des présentes de Monsieur Victor Balthasar Marie Ignace Willin de THUREY, ancien militaire, demeurant à Besançon, département du Doubs, passée en brevet devant Maître Sérrod, notaire audit Besançon en présence des témoins y dénommés, le 25 du mois d’avril dernier, dûment enregistrée et légalisée. Le brevet original de laquelle procuration, après avoir été certifié véritable par mondit Sieur DUHAL, demeurera annexé à ces présentes.
            Ledit Sieur De TUREY est représenté en ces présentes en sa qualité de Légataire universel, ou Légataire principal de madite Dame DEMIREMONT suivant, son testament prédaté.
            3° - Mademoiselle Christine (+) Gabrielle BIRETTE, fille majeure, demeurante à Soissons, et femme de Chambre de Madame De MIREMONT.
            4° - Du Sieur Nicolas LEFEVRE, dit La Jeunesse, Cuisinier de ladite Dame DEMIREMONT et demeurant audit Soissons.
            5° - Et du Sieur François BOER, dit LALLEMAND, attaché au service de Madame DEMIREMONT.
            Ladite Demoiselle BIRETTE et les Sieurs LEFEVRE et BOER, stipulant en ces présentes en leurs qualités de légataires particuliers de ladite Dame DEMIREMONT, suivant son testament dont il est parlé ci-dessus.
            A la conservation des droits des parties et de tous autres qu’il appartiendra.
            I1 va être, par Maître Nicolas Antoine Joseph RIGAUX, et son collègue, notaires impériaux, résidant à Soissons, soussignés, procédé à l’inventaire fidèle et description exacte de tous les meubles et objets mobiliers, deniers comptans, titres, papiers et renseignements, dépendans de la succession de madite Dame DEMIREMONT, et qui seront trouvés dans les lieux ci-après désignés de la maison, appartenant à Messieurs les héritiers BERTHEMET, située à Soissons, rue de l’Hôtel Dieu, N° - (blanc) où Madame DEMIREMONT est décédée, et où les notaires soussignés se sont exprès transportés.
            Tous ces objets seront représentés par ladite Demoiselle BIRETTE, gardienne des scellés dont il sera ci-après parlé. Laquelle a prêté serment entre les mains des notaires soussignés, de tout montrer et indiquer, sans en rien cacher ni détourner, comme aussi de n’avoir rien vu et de ne rien savoir qui eût été caché, et ce sous les peines de droit qui lui ont été expliquées par les notaires soussignés, et qu’elle a dit bien comprendre.
            Lesdits objets seront représentés et inventoriés aussitôt que les scellés apposés par Messieurs le Juge de paix du canton de Soissons, suivant sont procès verbal en date du 06 avril dernier, et enregistré, auront été par lui reconnus, sains et entiers, ci comme tels levés et ôtés.
            La prise des choses qui y sont sujettes sera faite par Monsieur Jacques Nicolas S........... , huissier demeurant à Soissons, expert choisi par mondit ........ suivant acte reçu par mondit Sieur le Juge de paix en date du 04 mai présent mois. Lequel expert à ce présent, a prêté serment entre les mains des notaires soussignés de faire ladite prisée en son âme et conscience à juste valeur, et ayant égard au cours du tems.
            Et les parties ont signé avec les Sieurs ............. experts et lesdits notaires, après lecture faite.
 
 
            Et de suite il a été procédé aux opérations annoncées plus haut de la manière qu’il suit.
 
Dans une cuisine voutée se trouvant au-dessous des appartemens ci-après désignés :
Francs
1° - Une paire de marmouzets, un grès, une pelle et une pincette, une poële à frire, une cloche, un couvercle de four de campagne. Estimé le tout
 
4,75
2° - Une cuillère à pot, une cuillère à dégraisser, un écumoir de cuivre jaune, une autre de cuivre rouge, une casserole et un moule à gâteaux de cuivre jaune. Estimé le tout
 
7,25
3° - 9 casseroles et un couvercle de cuivre rouge et une marmite aussi de cuivre rouge. Estimé le tout
 
15,00
4° - Un petit chaudron et une lampe à trois becs de cuivre jaune. Estimé le tout
2,50
5° - Une paire de hachettes, un fandret, un seau avec ses cercles et anse de fer, un bruloir à café. Estimé le tout.
 
3,25
6° - Une rôtissoir, 2 passettes, un entonnoir, 4 caffetières, 1 petite casserole, 2 bougeoirs en fer blanc. Estimé le tout
 
4,50
7° - 1 petit blocq, 2 tables à quatre pieds, 1 saladier, 1 petit panier à vesselle, 6 mauvaises chaises foncées de paille et 1 lot de poterie de terre. Estimé le tout
 
5,00
8° - 1 alambic à café et 1 boite à café de fer blanc, 6 goblets de ver, 1 pot à (écume), 6 bouteilles de ver. Estimé le tout
 
2,00
Dans un petit fournil à côté de la cuisine :
 
9° - 1 petit tour à pate, 1 table à quatre pieds de bois, 1 petit mortier de pierre et son pilon de bois, 4 pots de gré. Estimé le tout
 
3,50
Dans la cave dont la porte donne dans la cuisine :
 
10° - 1 pièce de vin de Jumigny rouge de la récolte dernière. Estimé le tout
60,00
11° - 232 bouteilles de vin rouge de différentes qualité. Estimé 60 centimes la bouteilles
 
139,20
Dans un élier avant ladite cave :
 
12° - Environ 200 cordes de bois à brûler essence d’orme, noyer. Estimé 10 Francs le stère
80,00
13° - 1 chevalet, 1 scie, 1 maistre. Estimé le tout
1,50
Dans une petite chambre au-dessous d’une petite cuisine qui se trouve dans la cour :
 
14° - 1 petite paire de mauvais chennets, 1 table à quatre pieds de bois noir, 1 table de nuit et son pot de faïence, 1 pot avec sa cuvette de faïence. Estimé le tout
 
4,00
15° - 2 fauteuils recouvert en velours d’Utrech fond verd, 1 petite chaise foncée de grain couverte (dumas) vert, 1 couchette à deux dossiers garnie de son fond sanglé et de roulettes à écaire. Estimé le tout
 
 
60,00
16° - 1 sommier de foin, 2 matelas de laine blanche, 1 travers de plume et 1 couvre pieds piqué. Estimé le tout.
 
50,00
17° - 1 garniture de litfaisant housse dite à fléche, composée d’un grand rideau de toile de coton et un autre petit rideau aussien toile de coton. Estimé le tout
 
24,00
Dans une mansarde au-dessus de ladite chambre :
 
18° - 1 paillasse, 2 matelas vieux, 1 travers de plume, 1 mauvaise couverture de laine blanche et 1 table à quatre pieds couverte d’une toile cirée. Estimé le tout
 
18,00
19° - 1 fauteuil, 1 chaise fonssée de paille. Estimé le tout
1,25
Dans une petite cuisine au-dessous de ladite chambre :
 
20° - 1 baignoire de cuivre rouge. Estimée................
40,00
21° - 1 grande table à quatre pieds, 1 fauteuil fonssé de paille et 1 panier à chauffer du linge. Estimé le tout
 
3,50
22° - 3 fers à repasser, 1 petit fourgon et 1 caffetière. Estimés
 
2,00
Dans une chambre à coucher au-dessus de la grande cuisine
 
23° - 1 paire de chennets à deux branches, 1 pelle et 1 pincette. Estimés
 
6,00
24° - 1 table à jouer à quatre pieds garni de son tapis verd, et 1 autre table ronde à trois pieds garnie d’une toile cirée, 1 autre petite table de noyer pliante. Estimées ensemble
 
 
16,00
24° - 1 table à jouer garni de son tapis vert, 3 fauteuils fonssés de crin, couvert en velour d’Utrech, et 1 chaise couvert en damas. Estimés
 
18,00
25° -1 couchette à deux chevets garni de son chassi sanglé et roulettes à écaire, 1 sommier de foin, de matelas de laine blanche, 1 lit et un travers en plumes, 1 couverture de coton et 1 de laine blanche. Estimés
 
 
190,00
26° - 2 rideaux d’ahore, et 1 pente en toile d’orange. Estimés
25,00
27° - 1 petit secrétaire bois de noyer. Estimé............
15,00
28° - 1 écritoire, 1 pot et sa cuvette de faïence et 1 boite de fer blanc peinte. Estimés
3,00
29° - 2 petits tapis de pied fonssés en laine et recouverts en toile d’orange. Estimés
1,50
30° - 1 armoire de bois (dare) à deux battants et 2 tirroirs. Estimés
12,00
31° - Dans ladite armoire :
3 paires de flambeaux de cuivre argenté, 2 petits chandeliers et 5 boujoirs de même. Estimés
 
 
24,00
32° - 1 soupière de porcelaine dorée, et 5 petits pots. Estimés
6,00
Dans une petite garde robe à côté :
 
33° - 1 pot à ail de faïence et son couvercle et 1 bidet garni de son bassin. Estimés
6,00
Dans une petite mansarde au-dessus :
 
34°- 1 couchette de bois (dans) et 1 chaise foncée de paille. Estimés
2,50
Dans le salon ayant deux croisées sur la cour :
 
35° - 1 feu garni en cuivre doré. Estimé
15,00
36° -1 petite pendule placée sur la cheminée en marbre noir garnie de son pied et de son globe. Estimés
 
100,00
37° - 2 lampes à quinquets et 1 lustre à quatre lampes et son plateau en ver garni en cristal. Estimés
 
40,00
38° - 1 petit secrétaire à silaindre, dit bonheur du jour en bois d’acajou garni de deux tiroirs fermants à clef, orné de sa balastrade en cuivre jaune, porte avec glaces et tablettes de marbre blanc. Estimés
 
 
120,00
39° - 1 table de bouiotte à quatre pieds, bois d’acajou, garnie de son tapis de drap verd, son chandellier à deux branches de cuivre argenté. Estimés
 
60,00
40° - 1 petite table à jouer à quatre pieds, aussi en bois d’acajou, garnie de son tapis verd et 1 petite chiffonnière de même bois ayant trois tiroirs ornée d’une galerie de cuivre doré et sa tablette de marbre. Estimés.
 
 
40,00
41° - 1 table à quatre pieds de bois blanc, montée sur roulettes en cuivre, formant table de jeu et de Tric-Trac garnie d’ormes, cornets, jettons et (goblets). Estimés.
 
20,00
42° - 1 petit écran, 1 petite table ronde à trois pieds plaquée en acajou avec galerie en cuivre et tablette de marbre. Estimés
 
9,00
43° - 3 écrans, 1 soufflet et 2 petits ballets. Estimés.
2,50
44° - 2 bustes de bronze représentant Jean Jacques Rousseau et Voltaire placés sur leur pied de marbre. Estimés
 
12,00
45° - 2 canapés, 6 fauteuils, 2 bergères et 2 chaises garnis de leurs dossiers, coussins de satin cramoisis foncés de crin. Estimés
 
190,00
46° - 3 fauteuils de tapisserie foncés de crin. Estimés.
30,00
47° - 4 rideaux de taffetas à carreaux rouges et blancs, garnis de leur draperie. Estimés
60,00
48° - 1 paravent de bois blanc à huit feuilles. Estimé.
9,00
49° - 1 tapis de pied. Estimé
12,00
Dans un petit cabinet à côté :
 
50° - 1 table de bois plaquée à quatre pieds montées sur roulettes de cuivre dite à deux f...s, ornée de sa galerie et de son dessous en marbre estimé avec 1 petite table en bois blanc à quatre pieds
 
 
13,00
51° - 1 pot à (oeil ou ail) de faïence son couvercle et son pied, 1 table de nuit et ses deux portes, 1 petit guéridon et 1 lit de sangle. Estimés
 
8,00
Dans une salle à manger ayant pareillement deux croisées sur la cour :
 
52° - 1 poêle de faïence garni de ses tuyaux en tolle. Estimés
18,00
53° - 2 petites servantes en bois blanc. Estimées
9,00
54° - 1 fauteuil couvert en velour d’Utrech fond verd, foncé de crin, 1 autre foncé de paille garni de son dossier aussi foncé de crin, 1 autre et 2 chaises foncés de paille. Estimés
 
9,00
55° - 1 petite lampe de fer blanc, 1 soufflet, 1 rappe de fer blanc. Estimés
2,50
Dans une des armoires au-dessous des croisées :
 
56° - 12 tasses à café et leurs soucouppes, 6 compotiers et leurs couvercles, 3 sucriers, 2 compotiers et leurs couvercles, 2 beurriers, 2 théières, 1 pot à crème, 2 caffetières, 1 écuelle, son couvercle et son plat, 1 autre écuelle et son couvercle, 4 plats ronds et 1 moutardier, le tout de porcelaine. Estimés
 
 
 
30,00
57° - 15 gobelets de cristal, 12 vers à pied; 4 petits vers à liqueur, 1 huilier et 6 carafes, 4 saillières. Estimés
 
12,00
Dans une armoire au-dessous de la seconde croisée :
 
58° - 8 plats rons et ovales de porcelaine à filets dorés et 2 douzaines d’assiettes de porcelaine de rebut. Estimés
 
30,00
Dans le vestibule avant d’entrer dans ladite salle à manger :
 
59° - 1 fontaine de cuivre rouge à deux robinets. Estimée
2,00
Dans une chambre à coucher à côté de ladite salle à manger, ayant une croisée sur le jardin :
 
60° - 1 petite paire de chennets, 1 pelle et 1 pincette. Estimés
3,50
61° - 1 commode de bois de noyer à quatre tiroirs fermant à clef. Estimée
8,00
Dans les tiroirs de ladite commode :
 
62° - 3 douzaines de serviettes ouvrées. Estimées
17,00
63° - 3 grandes nappes ouvrées. Estimées
6,00
64° - 1 robe de toile de coton, 2 corsets, 2 peignoirs, 1 paire de poches, 5 mouchoirs de mousseline. Estimés
 
14,00
65° - 9 chemises de ladite Dame défunte. Estimées
20,00
66° - 20 mouchoirs de poche en toile et 6 mauvais juppons de dessous en toile de coton. Estimés
 
17,00
67° - 4 toiles d’ozeilles. Estimées
3,00
68° - 11 draps de toile de chanvre. Estimés
33,00
69° - 1 fauteuil garni de velour d’Utrech foncé de crin, 2 petites tables à jouer garnies de tapis verd, 1 autre table de noyer à quatre pieds (avec) toile cirée, 3 boites de jeu garnies. Estimés
 
 
12,00
70° - 1 autre table à quatre pieds de bois blanc, 1 table de rais, 1 petite chaise d’enfant garnie de ses dossiers et coussin foncés de crin et 2 chaises foncées de paille. Estimés
 
2,50
71° - 1 housse de lit à baldaquin de toile peinte et des rideaux pareils. Estimés
12,00
72° - 1 lit composé de sa couchette de bois (dar) et 2 chevets garnie de son chassi sanglés et de roulettes à écaire, 1 sommier de foin, 2 matelas de laine, 1 lien, 1 travers et 1 oreiller de plumes, 1 couverture de coton, 1 paire de draps de toile de chanvre. Estimés
 
 
90,00
73° - 1 morceau de tapisserie servant de tapis de pied. Estimés
4,00
Dans un cabinet attenant à ladit chambre ayant aussi une croisée sur le jardin :
 
74° - 1 grand bureau de bois peint. Estimé................
6,00
75° - 2 chandeliers de bureau à 2 branches chacun et 1 paire de mouchettes de cuivre argenté estimés avec un nécessaire de porcelaine
 
15,00
76° - 1 table à manger de bois blanc son pied et ses ralonges. Estimée.........................................
 
6,00
77° - 1 fauteuil à canne, 4 chaises foncées de paille. Estimés
4,00
78° - 1 soupière, 24 assiettes de porcelaine à filets dorés. Estimés
24,00
70° - 4 douzaine d’assiettes de porcelaine unie, 1 saucière et son plat aussi de porcelaine. Estimés
 
50,00
80° - 12 petits couverts de métal doré, 12 couteaux de table pareils. Estimés
24,00
81° - 1 porte liqueur de bois garni de ses trois carafons et douze gobelets à pied, 2 sucriers de faïence. Estimés.
 
6,00
Et attendra qu’il est trois heures de relevée sonnées, les notaires soussignés après avoir vaqué à ce que dessus par triple vacation, ont, de consentement de toutes les parties cidevant nommée, qualifiées et domiciliées, arrêté en cet endroit la présente vacation, et remis la continuation du présent inventaire à ce jourd’hui quatre de relevé
            Et les parties, sous toutes réserves et de droits ont signé en cet endroit avec ledit Sr BRINQUANT, expert et lesdits notaires après lecture faite.
            Tous les objets qui viennent d’être décrits et inventoriés ont été, du consentement de toutes lesdites parties, laissées en la garde de ladite Dlle BIRETTE, qui l’a reconnu, et s’en est volontairement chargée, pour les représenter quand et à qui il a appartiendra.
            Et lesdites parties ont signé après lecture faite, ainsi qu’il est ci-dessus.
 
6 may 1811
 
            Et ledit jour 06 May 1811, quatre de relevée
            Mtre RIGAUX et son collègue, notaire impérial à Soissons, soussigné, s’étend transportés dans la maison occupée par madite Dame de Miremont située à Soissons, rue de l’Hotel Dieu, N° - ont, à l’enquête et en présence de toutes les parties ci-dessus dénommées et qualifiées, procédé à la continuation dudit inventaire de la manière suivante :
            mais à l’instant même il a été découvert par Mtre RIGAUX, l’un des notaires soussignés, dans le tiroir à droite du bureau de ladite Dame Demiremont, p... dans son cabinet un paquet cacheté de cire noire, portant en inscription : ceci et mon testament renouvellé le 01 avril 1810, etc...
            Mr LIEBERT, au nom dudit S Defougère du consentement de mondit Sr VERNIER, exécuteur testamentaire et toutes les autres parties comparantes, a requis que par Mtre RIGAUX, l’un des notaires soussignés, ce paquet fut présenté à l’instant même à Mr le président du tribunal civil de Soissons, pour être par lui ouvert, et le dépôt en être donné conformément à la loi ; en conséquence la vacation a été suspendue jusqu’au retour dudit Mtre RIGAUX.
            Et ont les parties signé en cet endroit sous toutes les réserves de droit.
 
            A cinq heures? ledit Mtre RIGAUX, étant rentré dans la maison de ladite dame de Miremont, où toutes les parties étaient restées réunies, il a rapporté que le paquet ouvert par Mr LALOUREE, juge suppléant, pour l’absence du Président, contenait le testament renouvellé de ladite Dame Demiremont, sur le type du premier, sauf deux modifications par elle faites au legs de Mlle BIRETTE et à celui de son exécuteur testamentaire ; il a dit que Mr BERNIER, juge, lui avoit donné acte, et fait dresser procès verbal de sa présentation et de son ouverture, et ordonné que l’original dudit testament serait déposé pour minute en l’étude dudit Mtre RIGAUX.
            En conséquence du consentement de toutes les mêmes parties, il a été procédé à la continuation du présent inventaire, ainsi qu’il suit :
 
Dans un petit vestibule, ayant son entrée sur l’escalier a été fait l’ouverture d’une grande armoire de bois blanc à trois battans fermans a clef, ladite armoire faisant partie de la maison et dans laquelle se trouve :
 
82° - 5 paires de drap de chanvre. Estimés
36,00
83° - 1 autre petit drap de toile de chanvre, 2 nappes ouvrées, 10 serviettes aussi ouvrées. Estimés
 
13,00
84° - 2 peignoirs et 2 garnitures de baignoire. Estimés.
8,00
85° - 15 chemises de toile de chanvre à l’usage de ladite défunte. Estimées
20,00
86° - 3 toiles d’oreiller, 1 juppon de gaze, 1 coussin garni en soie, 3 chemise de toilette, 5 paires de poches, 2 autres peignoirs de toile de chanvre, 1 mauvaise robe de mousseline brodée, et 1 autre petite chemisette de toile de chanvre. Estimés
 
 
9,00
87° - 1 couverture de coton tricoté, 1 petite redingote de mousseline, 1 autre de toile de coton, et 1 de mousseline brodée, 1 petit couvre pied piqué, 1 petite robe de (linon), 1 autre de mousseline, 1 petit jupon de coton tricoté, et 1 autre jupon de toile de coton brodé. Estimés
 
 
 
23,00
88° - 1 jupon de toile de coton, 1 autre de même garni, 1 autre de même aussi garni, 1 autre de mousseline unie, 1 autre de mousseline garnie, 1 robe de toile de coton, 1 autre robe et 1 jupon de mousseline et 1 jupon de coton tricoté. Estimés
 
 
26,00
Dans une petite chambre occupée par Mlle BIRETTE :
 
- Trouvés tous les habits, meubles et effet à son usage et a elle appartenant et par elle réclamés, lors de l’apposition des scellés et constaté par le procès verbal d’apposition, en conséquences, il a été passé outre du consentement de toutes les parties.
 
Dans une chambre ayant vue sur le fond du jardin :
 
89° - 1 paire de chenets avec têtes en cuivre, 1 pelle et pincette. Estimés
8,00
90° - 1 toilette en bois de noyer avec sa glace et garniture. Estimées
15,00
91° - 2 tables à quatre pieds et 1 petit écrin. Estimés
5,00
92° - 2 lampes et leurs pieds. Estimés
4,00
93° - 1 bergère et 2 fauteuils foncés de crin couvert en perse. Estimés
18,00
94° - 1 autre bergère, 1 tapisserie garnie de son coussin, 1 autre écrin, 1 petite chaise foncée de crin couverte en toile, 1 autre fauteuil couvert en toile à carreaux et foncé de crin. Estimés
 
 
7,00
95° - 1 autre fauteuil et 1 chaise, 2 tapisseries foncées de crin, et 1 petit marche pied. Estimés
 
9,00
96° - 1 petite table de bois blanc à quatre pieds, 1 baromettre. Estimés
5,00
97° - 1 table ovale en bois blanc, 1 chaise foncée de paille, 1 pot et sa cuvette de faïence. Estimés
 
7,50
98°- 1 housse de lit à colonne et à l’impériale et la couchette garnie de son chassis sanglé et de ses roulettes à écaire et la garniture dudit lit ainsi que les rideaux et la courte pointe d’indienne à bouquets fond blanc. Estimés
 
 
60,00
99° - 1 matelas de laine blanche garni en (futaine), 1 lit, 1 travers et 2 oreillers de plumes et 1 couvre pied de satin cramoisis. Estimés
 
130,00
100° - 1 commode de bois dur à quatre tiroirs fermant à clef. Estimé
15,00
101° - 1 douzaine de mouchoirs de mousselines, 8 paires de bas de soie de différentes couleurs. Estimés
 
14,00
102° - 1 boite dans laquelle se trouve 1 paire de boucle à soulliers usage de femme, 1 paire de bracelets et 1 paire de crochets, le tout (en pierres ou en ferres). Estimés.
 
6,00
103° - 2 vieux mantelets et 2 coiffes de taffetas noir. Estimés
3,00
104° - 3 boites à thé, 1 chandelier, 2 bonnets. Estimés
2,50
Dans le cabinet de Mme Demiremont :
 
105° - 7 tuyaux de poële de tolle et 2 coudes. Estimés
8,00
106° - 1 théière de porcelaine. Estimés
3,00
107° - 2 petites tables de bois blanc à quatre pieds garnies chacune de leurs tiroirs, 1 bureau aussi de bois blanc. Estimés
 
5,00
            Et attendu qu’il est 07 heures de relevée sonnées.
            Les notaires soussignés, après avoir vâqué à ce que dessus par simple vacation, ont du consentement de toutes les parties dénommées, qualifiées, et dénommées entête du présent inventaire, arrête en cet endroit la présente vacation, et remis la continuation dudit inventaire au lendemain 09 heures du matin.
            Et ont, toutes les parties signées avec les Sr BRINQUANT, expert, et les notaires soussignés après lecture faite.
            Et tous les objets qui viennent d’être décrits et inventoriés ont été, du consentement de toutes les parties, laissés en la garde de Mlle BIRETTE, qui l’a reconnu, et s’en est volontairement chargée, pour les représenter quand et à qui il appartiendra.
            Et lesdites parties ont signé après lecture faite, ainsi qu’il vient d’être dit.
 
 
7 May 1811
            Et ce jourd’hui 07 mai 1811, 09 heures du matin.
            Mtre RIGAUX et son collègue s’étant transportés dans la maison occupée par madite Dame Demiremont, située rue de L’Hotel Dieu, N° - ont, du consentement et en présence de toutes les parties ci-dessus dénommées et qualifiées, procédé à la continuation dudit inventaire de la manière suivante :
            Par suite et dans le cabinet de ladite dame Demiremont duquel nous sommes sortis hier soir.
 
108° - 2 fauteuils foncés de crin et couvert en soie. Estimés
8,00
109° - 2 chaises et 1 tabouret de tapisserie foncés de crin. Estimés
6,00
110° - 2 boittes de toilette fermans à clef, 1 petit guéridon, 1 chandelier de bureau et 2 petites tablettes formant bibliothèque. Estimés
 
5,50
111° - 9 tableaux garnis de leurs vers et cadres. Estimés.
6,00
112° - 1 montre d’or à répétition ornée de son cachet et de sa chaine en or. Estimés
150,00
113° - 1 autre montre d’or garnie de sa chaine d’or. Estimés
120,00
114° - Le dictionnaire historique en (5) volumes, 1 manuel lexique, en deux volumes - Histoire de France, en deux volumes - dictionnaire géographique portatif, deux volumes - traité géographie, un volume. Estimés
 
 
5,00
115° - Dictionnaire de chimie, deux volumes - analyse de chimie, un volume - dictionnaire d’histoire naturelle, un volume - idem, en deux volumes - idem, en trois volumes. Estimés
 
5,00
116° - Dictionnaire de physique, cinq volumes - trois autres dictionnaires brochets. Estimés
6,00
117° - Les œuvres de (Sénéque), sept volumes - portrait des rois de France, quatre volumes - Contrepoison et l’arsenique, deux volumes. Estimés
 
9,00
118° - 20 volumes de différents ouvrages reliés. Estimés
10,00
119° - Œuvres de Voltaire, quatre volumes - Sa philosophie de l’histoire, un volume - L’esprit de Montaigne, un volume - Considération sur les causes de la grandeur des Romains, un volume. Estimés
 
 
9,00
12° - Leçons de littérature,deux volumes - (Cacite), cinq volumes -œuvres de Sasaste, un volume - L’esprit de l’histoire, quatre volume - Histoire de France, quatre volumes. Le tout brochés. Estimés
 
 
20,00
121° - 20 autres volumes brochés de différents ouvrages. Estimés
4,00
Dans une petite garde robe à côté de la chambre de Madame Demiremont :
 
122° - 1 (morne), 1 table de nuit et son pot et 1 petit travers de plumes. Estimés
7,50
123° - 1 petit poële de faïence à roulettes, 1 mauvais bidet, 1 petit guéridon, et 1 fontaine à filtre. Estimés
 
15,00
124° - 1 douzaine de torchons et 4 tabliers de cuisine et 8 paires de souillers de différentes couleurs. Estimés
 
7,00
125° - 20 coupons de dentelles de différentes façons et 2 paires de manchette à trois rangs aussi de dentelles en très mauvais état. Estimés
 
50,00
126° - 1 miroir de toilette. Estimés
5,00
127° - 15 robes de soie et toile de toutes couleur. Estimées
80,00
128° - 2 grands rideaux de toiles de coton. Estimés
9,00
129°- 1 grand marchepied pliant. Estimés
5,00
Dans la chambre de BOER dit Lallemand :
 
130° - 1 lit composé d’une buchette de bois dur, 1 paillasse de longue paille, 2 vieux matelas de laine, 1 travers de plumes, et 1 paire de draps de toile de chanvre, 1 petite couverture de laine blanche, 1 mauvais couvre pied de toile. Estimés
 
 
40,00
131° - 1 bas d’armoire de bois blanc à deux battants fermans à clef dans lequel se trouve renfermé les habits et linge à l’usage dudit BOER, 1 petite table en bois dur à quatre pieds et 1 fauteuil foncé de paille. Estimés
 
 
10,00
Dans une petite mansarde occupée par Mr LEFEVRE:
 
132° - 1 lit composé d’une mauvaise couchette, paillasse de longue paille, 1 vieux matelas, 1 travers de plume, 1 couverture de laine blanche et 1 chaise foncée de paille. Estimés
 
16,00
Dans un petit grenier à côté de ladite mansarde :
 
133° - 2 males, 1 grandes vache, 1 portemanteau de cuir, 1 autre de drap, 1 métier à tapisserie, 2 persienne et 2 mauvais fauteuils de paille. Estimés
 
20,00
Dans un autre grenier à côté :
 
134° - 400 bouteilles de ver. Estimés 12 F le cent
48,00
Dans un autre grenier :
 
135° - 4 grands traiteaux. Estimés
2,00
Dans la cour et sous une remise :
 
Environ 16 stères de bois blanc dit réchauiage. Estimés
80,00
Dans l’écurie :
 
137° - Environ 4 stères de bois de noyer à brûler. Estimés
24,00
138° - 2 arrosoirs de cuivre jaune, 1 bêche et 1 râteau. Estimés
7,00
Argenterie :
 
139° - 3 grandes cuillères à fillets à ragouts, 1 autre demi unie, 15 couverts à fillets, 1 autre uni, 12 cuillères à café, 1 cuillère percée à sucre, 5 cuilères à sel, par la pesée de cette argentrie qui a été à l’instant faite par le Sr Siméon Beauvair, marchand orfèvre à Soissons, il il est résulté qu’elle pésait en total 3.888 grammes, faisant à l’ancienne mesure de pesanteur 15 marcs 7 onces ½ gros, qui estimé par la loi à raison de 50 Francs les 2 hectogrammes 44 grammes 57 centigrammes ou le marc donne la somme de
 
 
 
 
 
794,14
A l’instant ledit Sr Beauvair à ce présent et affirmés sincères et véritables lesdites pesées et l’estimation et à signé en cet endroit : Beauvair
- objets légués par Madame Demiremont par ses deux testaments dont il est parlé ci-dessus.
 
140° - Une loupe, estimée et léguée à Madame De Sabran
12,00
141° - 1 bague à tête antique, léguée à la même. Estimée..
30,00
142° - L’Atlas de Lesage et de Mornot, légué à ladite Dame De Sabran. Estimé
200,00
143° - 1 chaine d’or en bague et 1 couteau à lame d’or, légués à Madame De Galifet. Estimés
60,00
144° - 1 bague en cheveux, léguée à Madame de St Cierge. Estimée
6,00
145° - L’enciclopédie en ... huit volumes, légués à Mr De Sérionne. Estimée
300,00
146° - 1 voiture berline, léguée à Mr Mollet, docteur en médecine à Paris. Estimée
400,00
 
 
 
 
Total :
5.125,87
Deniers comptants :
 
145° - Il s’est trouvé la somme de 9.605 francs, tant en Napoléon d’or, qu’en pièces de 5 francs
 
9605,00
 
 
Total de l’estimation de la somme :
de 14.730 francs 84 centimes, y compris les deniers comptants
 
14730,84
 
 
Dettes passives :
 
La Demoiselle BIRETTE déclare qu’il est dû par la succession de Madame Demiremont, savoir :
 
1 - Pour les frais funéraires de ladite Dame, la somme de 271 francs
271,00
2 - pour son cercueil, 9 francs
9,00
3 - à Madlle Marcoin, sa garde, la somme de 19 francs
19,00
4 - à l’officier public, la somme de 14,50 francs
14,50
5 - au Sr Delory, pour le logement des soldats la somme de
15,00
6 - A ladit Demlle Birette pour dépenses par elle faites pour la maiszon depuis la mort de Made Demiremont et le payement de ses gages échus jusqu’au 06 mai, présent mois, la somme
 
 
183,00
7 - Audit Boër, dit Lallemand, la somme de 15 francs pour le payment de ses gages échus ledit jour, 06 mai présent mois, ci
 
15,00
8 - A Mr Depompéry, pour le prix d’une pièce de vin par lui, vendu à Mde Demiremont, et arrivée chez elle la veille de sa mort, frais de voiture, congé, la somme de ..
 
140,00
9 - A Mr Godelle, médecin à Soissons, la somme de
(blanc)
10 - Aux héritiers Berthemet, la somme de 200 francs, pour le trimestre du loyer de la maison occupée par Made Demiremont, et courant du 1er avril dernier
 
200,00
11 - Pour soldes des contributions de 1811
62,55
Total des dettes commuer à ce jour la somme de
929,65
 
 
 
            Aussitôt les notaires soussignés se sont livrés à l’examen et arrangement des titres et papiers, à leurs classification dans des liasses distinctes et séparées, à fin de rendre leur description plus claire et plus facile.
 
            Attendu qu’il trois heures de relevée sonnées, les notaires soussignés, après avoir vaqué à ce que de nous par double vacation, ont, du consentement de toutes les parties, arrêté en cet endroit la présente vacation, et remis la condition du présent inventaire à demain 08 du courant, à 09 heures du matin.
 
            Tous les titres et papiers, dont la classification vient d’être faite, ainsi que tous les objets ci-dessus décrits et inventoriés, ont été, du consentement de tous les dites parties, laissés en la garde de ladite Dlle Birette, qui l’a reconnu, ci s’en été volontairement chargée, pour les représenter quand ce à qui il appartiendra.
 
            Et toutes les dites parties, ont signé en cet endroit, sous toute réserve de droit, avec les notaires soussignés, après lecture faite ./.
 


[1] Il s’agit de Arolsen, capitale de cette principauté.
[2]Ordre Royal de la Croix Etoilée de Vienne - Autriche : Cette ordre autrichien a été établi en 1668 et approuvé par le Pape en 1669 à la suite de l’incendie du Palais Impérial de Vienne, qui s’arrêta dit-on devant une relique de la Vraie Croix. Il est réservé aux femmes de la noblesse. On l’a d’abord appelée : ordre des Chevalières de la Vraie croix, ordre le la Noble Croix - Ruban noir - Renseignements fournis par l’institut culturel Autrichien - Paris.
[3] Recueil de généalogies Vaudoises publié par la société Vaudoise de généalogie - Tome III - Lausanne - Librairie Payot 1950.
 
 
[4] La vie de société dans le pays de Vaud à la fin du XVIIIème siècle - Salomon et Catherine de Charrière de Sévery et leurs amis - par M. et Mme William de Sévery aux éditions Slatkine, Genève 1978.