MAUREGNY en HAYE et Les Cahiers d'Histoire

Cendres noires et chimie

 

Cendres noires et chimie



 Au mot «cendres» sont associés de nombreux qualificatifs : cendres pyriteuses, pyrito-alumineuses, vitrioliques, martiales. Tous sont liés à la chimie : le vitriol est le nom ancien des sulfates, les argiles sont des silicates d'alumine, les pyrites sont des sulfures de fer. Ces qualificatifs sont employés dans les usines chimiques où l'on produit la couperose (sulfate de fer) et l'alun (sulfate double d'aluminium et potassium). Le langage se précise pendant tout le XIXe siècle et, en 1911, l'École normale d'instituteurs de Laon produit une monographie sur l'usine vitriolique de Chaillevet11, décrivant avec précision les phénomènes chimiques et la technique de la production.

Les pyrites contenues dans le minerai s'oxydent spontanément en présence de l'oxygène humide et se transforment en sulfate ferreux et en acide sulfurique. Celui-ci réagit sur l'argile pour donner du sulfate d'alumine. La réaction est exothermique et «la chaleur de combinaison peut s'élever considérablement jusqu'à enflammer les lignites, et elle est souvent suffisante pour cuire l'argile des cendres et la colorer en rouge». Et voilà expliquée l'inflammation spontanée qui avait tant frappé lors de sa découverte. Le phénomène fut encore raconté par le journal l' Union de Reims, qui constatait le 20 septembre 1983, qu'un tas de «terre noire» déposé dans les vignes de la Montagne de Reims, avait pris feu, et que les sapeurs pompiers étaient intervenus. La chimie explique aussi le caractère toxique des fumées produites par ce qu'on appelait au XVIIIe siècle les«brûleries». Elles ont été accusées, dès 1760, de nuire à la végétation qui les entoure, de faire tomber les feuilles. Les entrepreneurs devaient payer des indemnités aux paysans pour les dommages commis aux récoltes". Il y eut en 1787-1788 une longue lutte avec plaintes, enquêtes, expertises et contre-expertises à Jussy13. Les habitants se plaignaient que la fumée «nuisait à la végétation, causait un dommage notable et pouvait faire tort à la santé des hommes». Ne s'agit-il pas là d'une ébauche de lutte écologique ? C'est d'autant plus frappant que le phénomène actuel des «pluies acides» est, en partie au moins, lié à l'usage du lignite dans les centrales thermiques. Ces fumées sont aussi à l'origine d'accidents mortels par asphyxie et, le problème d'aération, dans les mines en puits et galeries ou en galeries, a toujours été important. En 1762 déjà, lors de l'analyse des terres-houilles envoyées par le seigneur de Mauregny-en-Haye, on avait fait évaporer une lessive faite de ces terres, et «les parties sulfureuses et bitumineuses les plus fugitives» ont dégagé «une vapeur si forte et si caustique qu'il a fallu ouvrir les fenêtres du laboratoire». En 1772, trois mineurs périssent asphyxiés par les gaz toxiques dans la cendrière de Benais15. On retrouve ce problème à une échelle beaucoup plus grande lors du percement du tunnel du canal de Braye-enLaonnois. Le 18 août 1884, dix-sept ouvriers meurent par asphyxie16. L'inflammation spontanée des couches de lignite traversées et un défaut de ventilation en sont la cause.

10. Arch. dép. Aisne, 1 Mi 392-393, boîte 19, p. 1846.

11. «L'usine d'alun de Chailvet», Bulletin de la société de géographie de l'Aisne, 1911.


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par Gilbert Delbrayelle

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